Chapitre II : Écoulement uniforme

2. Calcul du régime uniforme

La leçon précédente nous a permis d'établir l'équation de l'écoulement uniforme ou équation de Chézy. Nous allons maintenant voir comment utiliser pratiquement cette équation. Mais avant de passer au calcul du régime uniforme proprement dit, attachons nous à voir comment établir les données dont nous avons besoin.

Théorie

Etablissement des données

Equations et images à vérifier car manquant !!!

Rugosité

La détermination de la rugosité se fait en fonction du revêtement des berges et du fond en utilisant soit le coefficient m et la table de valeur (succincte) de Bazin, soit le coefficient de Manning n et sa table de valeurs très complète.

Si nous préférons utiliser la formule de Chézy, nous pouvons calculer le coefficient C à partir de m ou n et du rayon hydraulique.

Par exemple, pour le canal ci-contre : canal semi-circulaire en béton lisse et en bon état, nous prendrons un n de Manning valant : 0.011 m-1/3s


Pente de fond

La pente de fond, dans le cas de rivières naturelles est déterminée, par exemple, par levés topographique ou par bathymétrie.


Sections

Les sections, même les plus complexes, sont en général ramenées à une forme polygonale simplifiée afin de permettre un calcul aisé du rayon hydraulique. Nous verrons dans les exercices à choix multiples et numériques divers exemples de calculs de rayons hydrauliques.

De plus, si la section est hétérogène ou composée, nous travaillerons avec un coefficient de rugosité équivalent. Nous verrons à la leçon 4 comment procéder.


Calcul du régime uniforme

Détermination du débit

Supposons un canal donné. On connaît :

  • La forme du canal, et donc la relation entre la profondeur d'eau h, l'aire mouillée A et le périmètre mouillé P;
  • La pente de fond S0 du canal;
  • Le matériau qui constitue le fond et les rives du canal, pour lequel on peut trouver la valeur appropriée de la rugosité, par exemple sous la forme de la rugosité n de Manning.

Si on connaît la profondeur h, on peut donc calculer la section mouillée A, le périmètre mouillé P et en déduire le rayon hydraulique :

Le débit est alors calculé à partir de la formule de Manning :

Ainsi dans le cas d'une section trapézoïdale de largeur au plafond l et de pente de talus p :


L'aire mouillée vaut la somme d'un rectangle et de deux triangles, soit :

et le périmètre mouillé vaut la largeur au plafond plus la longueur des talus, ceux-ci étant l'hypoténuse d'un triangle rectangle :

Ces valeurs introduites dans l'équation de Manning, écrite sous la forme :

mènent directement à la solution.

Détermination de S0

Ce problème peut se poser par exemple dans le cas de petits canaux d'irrigation, montés sur piles, de telles sortes que la topographie du terrain n'impose pas strictement une pente donnée. Dans le cas de canaux plus grands creusés dans le terrain naturel, on possède également un degré de liberté sur la pente, puisqu'il est toujours possible de s'écarter de la direction de la plus grande pente du terrain pour éviter des pentes et donc des vitesses excessives.

Le calcul de la pente de fond à donner à un canal de forme donnée pour un débit donné et une profondeur d'eau donnée se déduit de la formule de Manning :

où l'aire mouillée A, le périmètre mouillé P et le rayon hydraulique R se calculent comme précédemment en fonction de la profondeur d'eau.

Détermination de la rugosité

Si on a l'occasion de jauger un canal et si l'on constate que, sur une certaine longueur, la pente de la ligne d'eau et la pente de fond sont plus ou moins égales, et donc que le régime est sensiblement uniforme, on peut, en mesurant le débit Q et la profondeur d'eau h, en déduire par exemple le coefficient n de Manning :

A et R se calculent à partir de la profondeur d'eau h.


La valeur de la rugosité ainsi calculée pourra être utilisée, comme nous le verrons plus loin, pour le calcul du mouvement uniforme ou varié dans ce tronçon du canal, pour autant que les conditions d'écoulement soient à peu près les mêmes que dans le cas de la mesure (donc pas pour des grands débits par exemple, si la mesure a été effectuée pour de petits débits).

Détermination de la section mouillée

Dans le cas, deux degrés de liberté sont offerts : la forme de la section (du moins la largeur au plafond) et la profondeur d'eau. La présence de deux paramètres rend possible la recherche d'une solution optimale. Cette recherche sera exposée à la leçon II.4.

Calcul de la profondeur uniforme

Détermination de hu

C'est le calcul de la profondeur uniforme dans un canal donné pour un débit donné qui est le plus fréquent ! Le canal (ou le cours d'eau) existe et donc ses attributs sont connus :

  • La forme de la section,
  • La rugosité, par exemple sous la forme du coefficient de Manning n.

L'aire mouillée A, le périmètre mouillé P, le rayon hydraulique R ne sont pas connus puisque la profondeur d'eau h est inconnue, mais les relations qui lient A, P et R à h peuvent être déterminées puisque la forme de la section est connue.


Un certain débit Q se présente dans le canal, et on cherche le tirant d'eau qui sera nécessaire pour évacuer ce débit en régime uniforme, soit hu. La profondeur hu est ce que l'on appelle la profondeur uniforme ou profondeur normale.


Ce calcul est plus compliqué que les précédents car l'équation de Manning :

devient irrationnelle, car tant A que P sont des fonctions - parfois compliquées - de l'inconnue h. Le problème doit donc être résolu graphiquement ou itérativement.


Sections ouvertes

Généralement, les sections des canaux sont ouvertes, c'est-à-dire que la surface de l'eau est à l'air libre. Ces sections présentent, en général, une croissance plus rapide de leur aire A que de leur périmètre mouillé P quand le tirant d'eau h augmente. Le rayon hydraulique :

est donc une fonction monotone croissante de h et donc aussi le débit

Pour un débit Q dans un canal donné, il n'existe donc qu'une seule profondeur uniforme hu assurant un écoulement uniforme.


Section définie analytiquement

Si la section est définie analytiquement, on connait les expressions liant A et P à la profondeur d'eau h. La résolution peut alors se faire de façon itérative. Les étapes suivantes permettront d'arriver au résultat :

  1. Détermination des équations donnant A et P en fonction de h,
  2. Remplacement dans la formule de Manning des termes A et P par les équations trouvées au point 1,
  3. Transformation de l'équation obtenue au point 2, pour en obtenir une du type h = f(h),
  4. Résolution itérative en s'imposant une première valeur de h dans le membre de droite, calcul d'une nouvelle valeur de h dans le membre de gauche, que l'on réinjecte dans le membre de droite et ainsi de suite, jusqu'à convergence sur la valeur de h, convergence qui est en général assez rapide.

Vous trouverez un exemple de la démarche décrite ci-dessus pour le cas d'une section trapézoïdale en cliquant sur le lien proposé. La page "illustrations" propose un exemple d'application numérique pour une section trapézoïdale. Vous pourrez trouver également une application interactive de calcul de la hauteur uniforme dans une section trapézoïdale variable. (Attention, il vous faut un navigateur supportant le Java pour cette dernière application).


Section non définie analytiquement

Si la section n'est pas définie analytiquement, mais par exemple par une polygonale, il est toujours possible de trouver A et P pour une profondeur d'eau h donnée, mais l'estimation de ces valeurs se fait par approche numérique. Le calcul s'opère cette fois par essais et erreurs, en essayant diverses valeurs de h jusqu’à ce que la relation

soit satisfaite.


Sections fermées

Dans le cas de sections fermées (comme un égout par exemple), la hauteur uniforme hu peut ne plus être une fonction univoque de Q. Dans le collecteur figuré ci-dessous, quand le niveau de l'eau approche la génératrice supérieure de la conduite, l'aire mouillée n'augmente presque plus, alors que le périmètre mouillé s'accroît de manière substantielle. Au lieu d'augmenter, le rayon hydraulique

peut diminuer pour une valeur croissante de h et donc aussi le débit

Dans les environs du débit plein, deux hauteurs uniformes sont possibles pour le même débit.

On peut montrer que, dans le cas d'un l'aqueduc circulaire de diamètre D, le débit est maximum pour hu = 0,95D et vaut 1.07 fois le débit plein non en charge, c'est-à-dire le débit correspondant à une ligne d'eau coïncidant avec la génératrice supérieure de la conduite, mais sans mise sous pression.