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    Bilan qualitatif Cinquante-neuf États face à la pandémie de Covid-19

    Pierre-Joseph Laurent[1] Tel un tableau de bord, le site de la pandémie de Covid-19 de l’université Johns Hopkins reçoit, certains jours, un milliard de visiteurs : une référence planétaire. Il installe une comparaison entre les pays, dans la lutte contre le virus, en alignant les chiffres de décès par million d’habitants et les courbes supposées traduire l’aplatissement de l’épidémie[2] Mais que disent ces chiffres ? Pas grand-chose, car sans pondération, par exemple, de l’excès de mortalité causée par la Covid-19, par rapport aux années antérieures, ils demeurent incomparables. En marge de ces décomptes officiels, discutables, et de la communication se tiennent les arbitrages opérés par chaque État. Un arbitrage peu quantifiable, à comprendre autrement pour comparer les politiques. Une évidence, le Sars-CoV-2 tue et agir est une obligation. À la différence des questions climatiques, les conséquences de l’inaction portent sur l’horizon temporel du mandat des élus. Inattendu, sans échappatoires, l’arbitrage devient écrasant ; il concerne la vie humaine, l’économie, le marché, le bien-être général, la justice sociale, la liberté. Chaque décision influence différemment les classes sociales et peut accélérer la pauvreté. Avec le changement climatique, les inégalités qui se creusent et les bouleversements de la formation des opinions induits par les réseaux sociaux,…

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    Incertitudes, « deuil anticipatoire » et traumas De la nécessité de penser le confinement au-delà de ses enjeux sanitaires et économiques

    Un texte de Jacinthe Mazzocchetti (UCLouvain – LAAP), Florence Noël et Isabelle Loodts, initialement publié dans le rapport « déconfinement sociétal » sur cartaa academica. Outre ses répercussions en termes économiques et sanitaires, la période de confinement a eu des effets psychiques négatifs, voire traumatiques. En plus des altérations dans le courant ordinaire des modes d’existence, nous voudrions ici pointer quelques enjeux, leurs répercussions et l’attention qu’ils demandent dans les perspectives de déconfinement. De près ou de loin, nous avons tous été profondément affectés par la situation de pandémie. Parmi la population, de nouvelles catégories se sont fait jour, dictées par les statistiques de dangerosité du COVID19 autant que par la nécessité de protéger et de soigner les plus faibles. Le monde des travailleurs s’est divisé entre confinés et actifs, rejouant par ailleurs les diffractions de classe, de genre et de race structurant la société (Degrave, 2020 ; Timothy, 2020). Le monde des « inactifs » (enfants et étudiants, sans emploi, retraités) s’est bipolarisé, obligés d’être strictement séparés, les uns pouvant être vecteurs de la maladie pour les autres. Les personnes précarisées, hors de portée d’un État qui s’accommode depuis longtemps de leur gestion uniquement associative, ont été les grands oubliés des…

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    La voie des masques

    Par Bénédicte Fontaine, doctorante en anthropologie au Laboratoire d’Anthropologie Prospective de l’UCLouvain; Pierre-Joseph Laurent, professeur, membre du Laboratoire d’anthropologie prospective de l’UCLouvain et de l’Académie royale de Belgique, pour Carta Academica (publié le 09/05/2020 sur « Le Soir » ) La pandémie causée par le Covid-19 est une évidence sanitaire, provoquée par un virus objectivable. Mais la gestion de cette pandémie est-elle tout aussi objectivable dès lors que la prise en charge par les États de la quarantaine et du confinement se déroule en fonction de paramètres relevant de l’arbitrage politique et du possible et pas seulement de l’objectivité scientifique ? Dans sa simplicité, pour tout un chacun, le masque devient un bon révélateur de cet arbitrage et du possible. L’arbitrage  Les stocks de masques périmés détruits, non renouvelés au motif d’économie budgétaire. La désindustrialisation et les délocalisations mettent en lumière l’imprévoyance, les fragilités, les limites d’une gestion à flux tendus où l’arbitrage politique se fait surtout comptable et financier (1). La conséquence : la mise en place d’un pont aérien entre la Chine et des pays européens devenus dépendants (main d’œuvre trop chère, marge bénéficiaire insuffisante), avec en toile de fond une guerre industrielle et logistique (allongement de la chaîne d’approvisionnement)…