Quel est le risque d’événement ?
Les problèmes anesthésiques liés à la cocaïne découlent plutôt d’une absence d’arrêt, que d’un sevrage. À l’arrêt de la substance
La dépendance psychique à la cocaïne étant plus marquée que la dépendance physique, il n'y a souvent pas de risque majeur de sevrage à l'arrêt.
A la poursuite périopératoire de l’addiction
L’intoxication à la cocaïne entraîne une stimulation sympathique intense, source de tachycardie, hypertension artérielle, augmentation de la consommation d’oxygène myocardique, vasoconstriction coronaire et cérébrale, responsables des accidents cardiovasculaires et cérébraux.
Au long cours, la cocaïne peut provoquer également des complications coronaires, vasculaires (dissection aortique), ORL, psychiatriques, épileptiques, et respiratoires.
Existe-t-il une interférence avec les médicaments de l’anesthésie ?
Le risque de complication anesthésique chez le cocaïnomane est plus lié à la survenue d’une hyperstimulation sympathique qu’à de réelles interactions avec les médicaments de l’anesthésie.
Il n’existe pas de tolérance croisée entre la cocaïne et les opiacés. Il existe des interférences avec l’halothane qui sensibilise le myocarde à l’effet des catécholamines. Des interférences sont possibles avec la kétamine et l’étomidate.
Il a été suggéré que l’effet de la succinylcholine pourrait être prolongé.
Les â-bloquants sont contre-indiqués chez le cocaïnomane, car ils peuvent majorer l’effet vasoconstricteur de la cocaïne, et exacerber la vasoconstriction coronaire ou l’hypertension artérielle. Le traitement des manifestations cardiovasculaires induites par la cocaïne peut faire appel sans risque aux benzodiazépines, à l’hydralazine, aux dérivés nitrés, aux inhibiteurs calciques (vérapamil) et à la phentolamine. L’association de benzodiazépines et de dérivés
nitrés est recommandée par l’American Heart Association comme traitement de première intention des syndromes coronariens aigus liés à la cocaïne.
Une instabilité tensionnelle (hypertension ou hypotension) due à l’usage de cocaïne peut survenir au cours d’une anesthésie locorégionale axiale ou d’une anesthésie générale. L’utilisation de l’éphédrine doit être prudente car elle peut déclencher une poussée hypertensive.
Proposer une stratégie d’arrêt, de maintien et/ou de substitution
Des complications cardiovasculaires peuvent survenir malgré une abstinence de quelques jours.
Il est recommandé un sevrage complet d’une semaine minimum avant une intervention pour éviter tout risque de complication grave périopératoire, un sevrage plus court ne protégeant pas de la survenue de telles complications.
Des données expérimentales récentes suggèrent que l’ondansétron pourrait s’avérer un traitement efficace du syndrome de sevrage de la cocaïne.
Proposer une technique d’anesthésie et d’analgésie adaptée
Aucune technique anesthésique n’est interdite ou contre-indiquée avec la cocaïne.
Le propofol et le thiopental sont utilisables sans danger chez les patients cocaïnomanes.
En cas d’anesthésie générale, compte tenu des interférences décrites plus haut, il est recommandé d’éviter l’étomidate, la kétamine et l’halothane (les autres halogénés étant utilisables). Il est également recommandé de rester vigilant aux stimuli qui, comme la laryngoscopie, peuvent déclencher une hyperstimulation sympathique.
L’effet de la succinylcholine pourrait être légèrement prolongé. Cependant, il n’est pas recommandé de contre-indiquer la succinylcholine, notamment lors d’une induction en séquence rapide.
Une thrombopénie peut survenir chez le cocaïnomane. En cas d’anesthésie locorégionale axiale, il est recommandé de demander au minimum un dosage des plaquettes (grade C).
Cocaïne et anesthésie obstétricale
Les complications cardiovasculaires seraient plus fréquentes pendant la grossesse. L’analgésie péridurale obstétricale du travail est recommandée, cependant les conséquences hémodynamiques et la possibilité d’une thrombopénie sont à prendre en compte avant de poser cette indication. Il est recommandé de vérifier le taux de plaquettes avant la réalisation d’une anesthésie locorégionale axiale chez les parturientes cocaïnomanes.