Colloque Dispositifs et Médiation des Savoirs (1998)

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Entreprise apprenante et dispositifs de formation

Bernard Fusulier
Unité de Sociologie (USOC), UCL

 

A partir d'un terrain spécifique, celui de la formation attachée aux formes d'organisation du travail en rupture avec le taylorisme, nous alimenterons la réflexion sur les transformations des pratiques actuelles en matière de production et de transmission des savoirs. Sans pour autant donner un statut théorique à la notion de dispositif, il nous semble qu'elle a néanmoins sa place comme mode de désignation ou d'appréhension des moyens disposés conformément au plan managérial de développer l'intelligence individuelle et collective au sein de l'entreprise qui se veut "apprenante".

La formation des travailleurs de l'entreprise devient de plus en plus stratégique et ce, de deux façons. D'une part, la formation est un des vecteurs utilisés pour transformer l'entreprise, lorsque celle-ci pré tend explicitement "rompre avec le taylorisme" qui devient une figure repoussoir, dont l'incapacité de faire face avec succès aux nouvelles donnes du système productif est de plus en plus dénoncée en Europe. D'autre part, la formation apparaît comme une des composantes fondamentales de la "nouvelle entreprise" naissante. La question de la formation se confond presque avec celle de la définition des formes mêmes de ce "nouveau mo dèle d'entreprise" (Maroy, 1993; Fusulier et Maroy, 1994).

Plusieurs auteurs ont souligné l'importance de logiques organisa tionnelles qui assurent une capacité à développer conjointement des savoir-faire et de l'innovation (Maurice, 1991). Dans cette optique, le rôle de plus en plus crucial de l'intelligence collective est mis en avant dans la mise en oeuvre de procédés de production qui reposent moins sur l'addition des interventions et des compétences (poste de travail par poste de travail) que sur leur combinaison interactive. Ces perspectives interrogent le rôle des entreprises comme dispositif de production et d'acquisition de connaissances et de compétences, au delà de leur fonction de "producteurs de biens". Avec le recours au concept "d'entreprise apprenante", la réflexion se fait autant descriptive que normative puisque ce concept est défini comme une sorte d'orga nisation cible, une forme idéale qui permettrait de faire de l'organisation un lieu de production de nouvelles compétences et savoirs, de leur appropria tion reconnue par les salariés, tout en assurant l'adaptation de l'entreprise aux donnes changeantes du contexte. Si l'entreprise est de plus en plus amenée, au moins dans certains scénarios organisationnels que nous expliciterons, à jouer un rôle "d'offreur" de formation au côté des offres de formation étatiques, cela ne pose-t-il pas la question des transformations des manières d'apprendre attachées à la multiplication des dispositifs de médiation des savoirs ? Comment appréhender la formation et les effets formateurs des nouvelles formes d'organisation du travail ? Voilà autant de questions qui sont au coeur de notre communication.

La multiplicité des formes et processus de construction et de diffusion des connaissances nous oblige à sortir des catégories mises en place au cours du fordisme (par ex. formation formelle versus formation informelle), pour élaborer de nouvelles catégories plus appropriées à l'entreprise apprenante (forme scolaire et forme non scolaire; processus discret et processus explicite). Nous proposerons de faire de l'expérience une notion centrale pour comprendre les dispositifs de génération des compétences.

 

 


  Auteur: Hugues Peeters — Modifications: Pierre Fastrez   
  Date de dernière modification: 09.03.2010