Les principaux évènements sont en rapport avec les interférences électromagnétiques (IEM) induites par les appareils électriques utilisés à proximité ou au contact du patient porteur d’un stimulateur ou d’un défibrillateur/cardioverteur implantable (DCI).
Quel est le risque d’évènement ?
Les IEM peuvent entraîner : 1) une inhibition de la stimulation, responsable de bradycardie ventriculaire ; 2) un passage transitoire en mode asynchrone (VOO) ; 3) un passage sur un mode de secours asynchrone sur certains boîtiers ; 4) exceptionnellement, une reprogrammation aléatoire et non réversible de certains paramètres.
L’IEM du bistouri électrique est favorisée par : 1) un courant de coagulation puissant ; versus un courant faible ; 2) un mode monopolaire ; versus un mode bipolaire ; 3) une application prolongée de la coagulation ; versus une application brève et intermittente ; et 4) l’interposition du boîtier entre la plaque de terre et le site de coagulation.
Les techniques d’ablation par radiofréquence peuvent entraîner une IEM, à type d’inhibition. La lithotripsie pourrait induire une IEM ou une détérioration du stimulateur peut être liée à la focalisation du tir de lithotripsie vers le boîtier. Un choc électrique externe (CEE) peut perturber transitoirement la stimulation ou la fonction de recueil ou détériorer le stimulateur. Une vérification du stimulateur au décours du CEE est indispensable. L’imagerie par résonance magnétique (IRM) expose à des IEM graves et est contre-indiquée.
Des IEM ont été rapportées avec les stimulateurs nerveux, les potentiels évoqués somesthésiques, les tables d'opération électriques et les porte-instruments chirurgicaux magnétiques. En revanche, aucune interférence avec les moniteurs de curarisation n’a été rapportée.
En cas de stimulateur double-chambre, on peut observer une fréquence ventriculaire élevée en cas de tachyarythmie auriculaire, de réentrée ou d’IEM à l’étage auriculaire.
Une interférence avec les capteurs d’asservissement peut modifier la fréquence de stimulation.
Concernant les DCI, une IEM peut conduire à la délivrance d’un choc électrique inappropriée ou à la non-reconnaissance d’une arythmie ventriculaire.
Existe-t-il une interférence avec les médicaments de l’anesthésie ?
Les agents d’anesthésie générale ne modifient pas le seuil de stimulation ou de défibrillation des DCI. La succinylcholine peut inhiber la stimulation (fasciculations) mais n’est pas contre-indiquée. Un taux plasmatique toxique de bupivacaïne ou de ropivacaïne peut modifier le seuil de stimulation.
Proposer une stratégie d’arrêt, de maintien et/ou de substitution
En cas de chirurgie programmée, la nature du trouble rythmique et les caractéristiques du stimulateur doivent être obtenues auprès du cardiologue traitant et notées dans le dossier d’anesthésie.
L’électrocardiogramme préopératoire est utile pour détecter certaines anomalies de fonctionnement. La radiographie thoracique peut permettre de vérifier la bonne position et/ou identifier le dispositif implanté. Un dosage de la kaliémie est utile chez les patients à risque de dyskaliémie.
La reprogrammation préopératoire des stimulateurs en mode asynchrone peut être proposée chez les patients dépendants du stimulateur, mais cela ne fait pas l’objet d’un consensus.
La fonction d’asservissement peut être déprogrammée pour limiter le risque d’interférence, mais cela ne fait pas l’objet d’un consensus.
En cas d’IEM peropératoire prévisible :
pour que cette fonction soit réactivée. Une attention toute particulière doit donc être portée à l’effet de l’aimant de façon à ne pas méconnaître une désactivation permanente de cette fonction. Dans le doute, le patient doit être surveillé dans une structure permettant de prendre en charge immédiatement un trouble du rythme jusqu’à réactivation de la fonction antiarythmique. La surveillance continue du rythme du patient dans une structure permettant de prendre en charge à tout moment une arythmie grave doit être assurée jusqu’à certitude de la remise en route de la fonction antiarythmique.
En cas de chirurgie urgente, l’ensemble des informations peut ne pas être disponible. La prévention des IEM et la préparation des mesures conservatoires en cas de dysfonctionnement du stimulateur sont fondamentales.
Doit-on faire appel à un spécialiste pour une décision collégiale ?
Un avis spécialisé, si possible auprès du cardiologue traitant doit être obtenu pour préciser la nature de la cardiopathie ou le type de dispositif lorsqu’il n’est pas connu,
Proposer une technique d’anesthésie et d’analgésie adaptée
Le monitorage continu du rythme (électrocardioscope) et de l’activité circulatoire (pléthysmographie de l’oxymètre de pouls, palpation d’un pouls artériel périphérique, auscultation des bruits du cœur, ou monitorage de la pression artérielle sanglante) doit être assuré pendant toute l’intervention. La détection de l'ischémie myocardique par analyse du segment ST est impossible chez les patients électro entraînés. Le choix de la technique d’anesthésie n’est pas guidé par la présence d’un stimulateur. En cas d’entraînement permanent ventriculaire, il faut tenir compte de l’absence de tachycardie réactionnelle.
Pour la majorité des stimulateurs, l’application d’un aimant sur le boîtier le fait passer en mode asynchrone. Bien que ceci réduise l’impact des IEM, cette
application n’est pas recommandée de manière systématique car ce mode peut être mal toléré et est plus consommateur d’énergie. Pour d’autres stimulateurs, le mode aimant ne correspond pas à un mode de stimulation. Le mode aimant n’est pas un mode de sauvegarde du stimulateur.
Pour les DCI implantés en France actuellement, l’application d’un aimant inhibe la fonction antiarythmique, sans modifier la fonction de stimulation. Il faut noter que certains CDI, non implantés en France au moment de la rédaction de ce texte, peuvent avoir une fonction antiarythmique inhibée de manière permanente après application prolongée (> 30 min) d’un aimant sur le boîtier. La réactivation de la fonction suppose une nouvelle programmation par télémétrie.
L’opérateur doit être prévenu des contraintes d’utilisation d’un bistouri électrique :
-Un bistouri bipolaire doit être privilégié lorsque cela est compatible avec l’acte réalisé,
Une IEM doit être recherchée lors de l’utilisation d’un appareil électrique à proximité ou au contact du patient.
En cas de CEE :
Proposer une stratégie postopératoire
La vérification avec le matériel adapté d’un stimulateur ou d’un DCI exposé à une IEM est recommandée. En cas d’anomalie, une reprogrammation doit être réalisée.
En cas de modification préopératoire du programme de stimulation et/ou de la fonction d’asservissement, une reprogrammation est nécessaire. En cas de déprogrammation préopératoire de la fonction antiarythmique d’un DCI (ou d’inhibition permanente pour certains DCI non implantés en France), la reprogrammation du DCI en postopératoire doit intervenir dès que le DCI n’est plus exposé à une IEM.