II. L'Infection
Urinaire Chez L'Enfant
Cours de néphrologie pédiatrique
MED22 secteur Uro-Néphro
Etienne SOKAL
L'infection Urinaire se différencie chez l'enfant de chez l'adulte par
les points suivants
- Elle signe souvent une pathologie rénale sous-jacente: uropathie
malformative, calculs...
- Elle s'accompagne de symptômes systémiques et d'un état
septique
- L'anamnèse ne permet pas de relever une symptomatologie spécifique
(mictalgie, pollakiurie..)
- Elle peut s'accompagner de troubles hydroélectrolytiques.
- Ignorée, la pyélonéprhite chronique peut hypothéquer
l'avenir de la fonction rénale et conduire à l'insuffisance
rénale
- Facteurs favorisant hors uropathies malformatives: mauvaise hygiène,
infection prépuciale, phimosis, corps étrangers, oxyurose, mycoses
vaginales. Vessie neurogène. Résidu post mictionnel.
L'infection urinaire survient par voie hématogène chez le nourrisson,
ou par voie ascendante chez le plus grand enfant.
Une cystite bactérienne aiguë se complique secondairement
de pyélonéphrite aiguë, par le biais du reflux vésico
urétéral: celui ci peut être transitoire, favorisé
par l'inflammation pariétale, soit favorisée par une malformation
anatomique de l'implantation uretérale.
La pyélonéphrite aiguë est
une infection du parenchyme rénal (corticale & médullaire).
L'inflammation et l'oedème, et ensuite les micro-abcès confluents
peuvent détruire le parenchyme. Elle est favorisée par une malformation
obstructive. Rapidement diagnostiquée et bien traitée, elle guéri
sans séquelles. Négligée, elle peut conduire à la
pyélonéphrite chronique et à l'insuffisance rénale.
La démarche clinique de la PNA en
dix étapes
- Reconnaître le syndrome septique*
et suspecter l'infection urinaire:
Devant un nourrisson qui fait une forte température (>38,5°C)
, l'infection du haut appareil urinaire sera suspectée en l'absence
de foyer clinique évident. Le syndrome septique sur infection urinaire
peut se voir chez un nourrisson dès les premiers jours de vie: Température,
frissons, vomissements, refus alimentaires, teint grisâtre, mauvais
état général, peu actif, diminution du contact, extrémités
froides. Sensibilité des flancs, et parfois palpation d'une néphromégalie.
Douleurs lombaires, mictalgies et pollakiurie sont plus nettes chez le plus
grand enfant.
Passer à l'étape N°6 si patient choqué....
- Prélèvement d'un échantillon d'urine pour analyse
microscopique et bactériologique. La pyuire est indicative, mais certaines
infections ne s'accompagnent pas de pyurie. Une hématurie peut survenir
dans les cystites aiguës, surtout causées par E Coli. Le diagnostic
bactériologique n'est pas toujours aisé:
- Difficultés liées au prélèvement: mauvaise
toilette, irritation muqueuse ou cutanée.
- Sacs collecteurs adhésifs. Ne peuvent rester plus d'une heure.
Se détachent, peuvent causer une irritation du siège
- Sondage urinaire: proscrit, surtout chez le garçon au vu
du risque de lésions de l'urèthre.
- Urine à mi-jet chez le grand enfant.
- La ponction sus-pubienne (1 travers de doigt au dessus de la symphyse
pubienne) sous transillumination ou échographie chez le nourrisson
< 1 an. Éviter les contaminations, grande fiabilité du
résultat.
- Infection parfois masquée par l'usage préalable d'antibiotiques.
- L'échantillon doit être envoyé directement au laboratoire,
et maintenu réfrigéré .
Germes responsables: E Coli, Proteus Mirabilis sont les plus fréquents
lors des premières infections. D'autres germes gram négatifs
sont retrouvés ensuite. L'infection urinaire survient par voie ascendante
ou hématogène.
- Prise de sang: Une hémoculture est systématiquement
prélevée . Un ionogramme, urée créatinine est
prélevé. Une hyponatrémie est parfois présente
chez le nourrisson en cas de PNA. Outre les examens d'urine, on réalise
un prélèvement sanguin: augmentation de la leucocytose neutrophile,
CRP élevée
- Une échographie permettra éventuellement de déceler
l'infection du parenchyme rénal: zone hypoéchogène, parfois
abcès. Elle montrera une éventuelle dilatation en cas de reflux,
syndrome de jonction.
- La scintigraphie au DMSA peut être plus sensible pour déceler
une infection aiguë du parenchyme , ou des cicatrices d'infection ancienne.
- Après prélèvements bactériologiques:
mise en perfusion et antibiothérapie visant les grams négatifs:
Cefuroxime ou autre céphalosporine ± aminoglycoside . En cas
de choc, volémisation du patient: Physio 10à20 cc/kg en 30 minutes.
NB: Cette étape doit être la priorité immédiate
si patient en mauvais état général, choqué...
- Evolution attendue: L'enfant devient afébrile dans les 24
à 72 heures. Le traitement est poursuivi par voie intraveineuse jusqu'à
normalisation du sédiment urinaire. Relai per os ensuite pour un total
de 10 jours.
- L'enfant est ensuite mis sous prophylaxie infectieuse : Furadantine,
3 mg/kg/jour. Alternatives: amoxycilline 30 mg/kg, Cotrimoxazole 6mg/kg
- Une imagerie par cystographie sus-pubienne est programmée
à distance de l'infection, après contrôle du sédiment
urinaire, afin de déceler une malformation
- En cas de malformation établie poursuite de la prophylaxie infectieuse,
prolongée ou jusqu'à correction chirurgicale si nécessaire.
Autres présentations de l'infection
urinaire
Bactériurie asymptomatique: Une infection urinaire peut, ne fusse
que transitoirement, être asymptomatique ou se manifester chez le nourrisson
par des symptômes peu évocateurs tels que T° intermittente,
mauvaise prise de poids , nausées, vomissements, diarrhée.
Le plus grand enfant peut présenter des douleurs abdominales, une énurésie
secondaire, des mictalgies, des urgences mictionelles.
Devant de tels symptômes et surtout en cas de poussées de température
inexpliquées (c.a.d. sans foyer clinique retrouvé), récidivantes,
il faut toujours évoquer et rechercher une infection urinaire.
Présentation sous forme de cholestase néonatale
L'infection urinaire (souvent E Coli) à bas bruit chez un nouveau
né peut se présenter sous forme d'ictère cholestatique.
L'analyse d'urine fait partie de cette mise au point.
Reflux Vésico-urétéral
bilatéral . Cystographie rétrograde 
Pyélonéphrite Chronique: Celle ci
ne devrait plus se voir qu'en cas d'uropathies malformatives sévères
imparfaitement corrigibles. L'inflammation chronique provoque une destruction
progressive avec fibrose des glomérules et des tubes, suivie d'une fibrose
interstitielle. Diminution de l'épaisseur de la corticale en échographie
et cicatrices. Apparition de protéinurie, hématurie et HTA. Insuffisance
rénale progressive.
Auparavant, la pyélonéphrite chronique était la première
cause de transplantation rénale chez l'enfant. Cette évolution
a largement disparu depuis l'échographie et la prise en charge rapide
et efficace des PNA et des malformations du tractus urinaire. Il est donc capital
de reconnaître l'infection urinaire et de suivre la démarche ci
dessus.
Rein de Pyélonéphrite
chronique:
atrophie, déformation,
rétraction
*NB: autres causes de syndrome septique chez
un nourrisson: pneumonie, méningite, infection articulaire, septicémie.
Questions
Quels sont le signes d'infection urinaire chez une nourrisson de 3 mois ?
Quelle est votre démarche diagnostique ?
Quelle est votre démarche thérapeutique ? A quel stade de votre
démarche instaurer le traitement ?
Quand faut il administrer une prophylaxie anti- infectieuse ?
Que suspecter chez une enfant qui présente une infection urinaire ?
(= cause favorisante) ?
Quels diagnostics suspecter devant un nourrisson septique ?