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Bulletin trimestriel - VOL 57, N°1, 2001 Echos du département de chimie. |
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Plusieurs de nos collègues, professeurs, chercheurs ou employés à l'Institut de Chimie, ont été admis à la pension. Nous reproduisons ci-dessous, avec sa permission, le texte des allocutions que le Doyen de la Faculté des Sciences, le professeur F. Borceux, a prononcées le 24 novembre, lors de la fête organisée pour les émérites et les pensionnés.
Léon Ghosez
Le professeur Léon Ghosez est incontestablement l'une des figures emblématiques du
département de chimie. Son esprit d'entreprise particulièrement décoiffant a toujours
provoqué autour de lui une effervescence des plus fructueuse, que son éméritat
d'ailleurs n'a en rien entamée.
Léon Ghosez fonde avec Heinz-Gunter Viehe, en 1965, l'école de chimie organique de l'UCL
dont la réputation internationale est aujourd'hui des plus enviable. On le retrouve
encore à l'origine d'un diplôme européen d'études approfondies en chimie moléculaire.
Actuellement, atteint par l'âge de l'éméritat à l'UCL, il vient d'entamer une nouvelle
carrière de professeur à l'Institut Européen de Chimie et de Biologie de Bordeaux, dont
il est d'ailleurs l'un des cofondateurs.
Scientifique courtisé, Léon Ghosez a été invité à faire plus de 400 conférences et
a occupé 25 chaires de professeur invité. Organisateur de plus de 40 congrès
scientifiques internationaux, éditeur de plusieurs revues scientifiques, il contribue
largement à la diffusion des connaissances, au-delà des 160 articles que lui-même a
publiés. Quant aux doctorats qu'il a dirigés, on en compte plus d'une centaine ? et
c'est loin d'être terminé.
Léon Ghosez a une capacité d'accueil extraordinaire, de même qu'un enthousiasme
communicatif et stimulant qui amène ses collaborateurs à sans cesse se dépasser. Il a
d'ailleurs une confiance très grande en tous ses collaborateurs et n'hésite pas à leur
confier la pleine gestion des projets qu'il initie, histoire peut-être de lancer pendant
ce temps un autre projet ambitieux. Un peu désorganisé cependant, ses talents
d'improvisateur génial lui permettent de maîtriser la situation et de toujours rebondir
vers d'autres horizons.
Et puis Léon Ghosez, c'est aussi le joyeux drille digne de figurer dans un tableau de
Breughel, le fin gastronome et l'?nologue averti, l'amoureux de musique classique qu'il
pratique d'ailleurs lui-même, le voyageur infatigable et le boute-en-train de soirées
mémorables.µ
Edmond de Hoffmann
Après sa licence et son doctorat à l'Université catholique de Louvain, Edmond de
Hoffmann débute sa carrière académique à l'université de Lovanium, à Kinshasa, où
il enseigne de 1965 à 1975. Cette période exaltante où se construisait une nouvelle
université fut à la mesure de son enthousiasme créatif. Pendant ces années, il
approfondit d'ailleurs ses compétences par un séjour comme chercheur à l'université de
Montréal. Ensuite il nous revient à l'UCL, où il poursuit sa carrière de professeur.
Edmond de Hoffmann a d'abord développé des recherches dans le domaine de la cinétique
chimique et du mécanisme des réactions, avant de prendre en 1979 la direction du service
de spectrométrie de masse de notre université. Il s'est imposé comme l'une des
sommités de ce domaine. Le livre qu'il a publié sur le sujet est de loin le plus
diffusé en langue française ; une version étendue de cet ouvrage a d'ailleurs été
publiée en langue anglaise et a été récemment traduite en polonais.
Membre de nombreuses sociétés savantes, promoteur de multiples contrats de recherche,
Edmond de Hoffmann a aussi été un gestionnaire remarqué. Président pendant sept ans du
département de chimie, il a eu le grand mérite d'oser bousculer ses collègues pour
adapter la structure de son département aux réalités de l'évolution de la science. Là
où chaque professeur avait l'habitude de régner en baronet local, il a eu le courage de
forcer une structure encourageant l'éclosion de véritables équipes de recherches, de
taille à relever les défis de la compétition internationale.
Au-delà des enseignements spécialisés liés à sa discipline de recherche, Edmond de
Hoffmann a aussi été pendant de nombreuses années celui qui avait la tâche, pas
toujours facile, d'initier les futurs ingénieurs commerciaux aux mystères et aux
merveilles de la chimie, une discipline qui pour certains d'entre eux, s'écartait bien
fort de leurs intérêts prioritaires.
Georges Leroy
Georges Leroy ne correspond certainement pas à l'image traditionnelle du chimiste,
caché derrière une forêt d'éprouvettes desquelles s'échappent d'intrigantes fumées
multicolores.
Georges Leroy est un théoricien pur et dur de la chimie, un scientifique qui s'intéresse
aux fondements de la chimie et plus particulièrement à la chimie quantique. Il a
consacré son énergie à l'étude de la structure et surtout de la stabilité des
molécules. A le voir à l'?uvre, un non-initié est en droit de se demander s'il est
occupé à observer un mathématicien ou un chimiste.
La production scientifique de Georges Leroy est abondante : plus de 250 articles et une
dizaine de livres. Son insertion dans la communauté scientifique nationale et
internationale mérite également d'être soulignée. Membre de nombreuses commissions
scientifiques, il eut également de nombreux contacts étroits avec l'UNESCO, notamment
dans le contexte de programmes de formation à l'intention des universités du
tiers-monde.
Mais Georges Leroy est aussi un grand professeur qui sait dépasser largement le cadre des
cours spécialisés liés étroitement à son domaine de recherche. Durant sa carrière,
il a notamment enseigné la chimie à des auditoires d'étudiants a priori peu enclins à
s'initier aux mystères de cette science, et il a toujours su les passionner.
Nous retiendrons de Georges Leroy l'image d'un homme imposant par son savoir et sa force
de caractère, imposant aussi par son physique qu'avec les années, il a souligné d'une
barbe impressionnante. Mais ceux qui le connaissent bien savent que derrière cette force
de la nature se révèle un homme profondément humain et chaleureux, avec
d'incontestables pointes de timidité.
Gabriel Germain
Figure énigmatique du département de chimie, le professeur Gabriel Germain a
travaillé dans l'ombre et l'anonymat de son laboratoire. Si beaucoup de collègues de
notre faculté ignorent jusqu'à son existence, sa notoriété scientifique est
internationalement reconnue et lui vaut d'être un maître particulièrement courtisé.
Gabriel Germain a connu la célébrité lorsque ses travaux en collaboration avec les
cristallographes de l'université de York, au Royaume Uni, l'ont conduit à mettre au
point le programme MULTAN. Celui-ci permet, par des techniques mathématiques de haut
niveau, une détermination automatisée de structures cristallographiques. Son
collaborateur, le professeur Woolfson, a d'ailleurs obtenu le prix Nobel pour cette
découverte à laquelle Gabriel Germain a contribué de manière décisive. Gabriel
Germain s'est vu pour sa part honoré par un doctorat Honoris Causa de l'université de
Barcelone.
La suite de la carrière scientifique de Gabriel Germain s'inscrit dans la continuité de
sa contribution à la conception du programme MULTAN. Car si ce programme sophistiqué est
capable a priori de déterminer la plupart des structures cristallographiques classiques,
les cas pathologiques le prennent en défaut et appellent des ajustements subtils. Gabriel
Germain s'est fait le champion incontesté de la prise en compte de tous ces cas
pathologiques et c'est du monde entier que l'on fait appel à ses compétences pour venir
à bout des cristaux les plus récalcitrants.
Gabriel Germain a certainement souffert des conflits et des luttes d'influence qui ont
secoué la cristallographie à l'UCL pendant de nombreuses années. Avec pour conséquence
une activité scientifique menée en marge de ses collègues et dont malheureusement, nos
étudiants n'ont pas pu profiter à sa juste valeur.
Jacques Glibert
Jacques Glibert est un chimiste que son parcours a mené tant du côté de l'industrie
que de la recherche fondamentale au sein de la faculté des sciences de notre université.
Formé dans le laboratoire du professeur Breckpot, Jacques Glibert se spécialise en
chimie minérale en relation avec l'industrie et oscille un temps entre une carrière
industrielle, à Hoboken, et une carrière scientifique dans notre université. Il opte
finalement pour cette dernière, malgré son intérêt profond pour les défis
industriels.
Les intérêts scientifiques de Jacques Glibert sont diversifiés, comme en témoigne sa
bibliographie. Discret mais toujours présent, modeste mais efficace, il fut encore
récemment le moteur de deux thèses de doctorat sur l'électrochimie en solution aqueuse.
Mais Jacques Glibert fut aussi un grand professeur. Sa priorité première a toujours
été le souci de bien servir l'étudiant. Là où tant de collègues estiment que leurs
missions pédagogiques ne sont pas suffisamment valorisées, lui sait où est la
véritable reconnaissance : non pas dans la réaction des autorités, mais dans la
satisfaction que lui expriment les étudiants. Ses cours de chimie générale aux futurs
ingénieurs civils ont toujours été des modèles du genre.
Comme beaucoup d'hommes discrets, Jacques Glibert cache derrière une modestie bien
sincère des trésors de savoir qui feraient envie à plus d'un. Ses connaissances
débordent largement le cadre des disciplines scientifiques et, si vous êtes féru
d'histoire par exemple, vous ne vous lasserez jamais de discuter avec lui.
Josy Weiler
D'origine luxembourgeoise, dont il a toujours gardé l'accent si caractéristique, Josy
Weiler a fait toute sa carrière dans notre faculté, au sein du personnel scientifique de
celle-ci. Son origine et sa formation lui valent de manier avec aisance le Français,
l'Allemand et l'Anglais ; il profite largement de ces atouts pour étudier en profondeur
une documentation scientifique fort diversifiée.
L'aspect encyclopédique de ses connaissances pousse de nombreux collègues à s'adresser
en priorité à lui lorsqu'ils veulent pénétrer un sujet s'écartant radicalement de
leur spécialité : Josy Weiler sait toujours leur conseiller et leur fournir la
documentation de base qui peut leur être utile.
Issu du laboratoire du professeur Bruylants, Josy Weiler est avant tout un organicien de
synthèse ayant une compétence affirmée dans les problèmes de physico-chimie. Dans ses
recherches, il a toujours accordé une attention particulière aux aspects structuraux,
où il a certainement développé ses thèmes de prédilection.
Mais Josy Weiler fut surtout un pédagogue remarqué autant que discret. Sa disponibilité
à l'égard des étudiants forçait l'admiration, surtout quand elle s'exerçait dans des
groupes de plusieurs centaines d'étudiants avec lesquels il réussissait le tour de force
d'avoir un contact personnalisé. La pédagogie de proximité est une réalité qu'il a
pratiquée tout au long de sa carrière.
Au-delà du contact direct avec l'étudiant, Josy Weiler développait aussi une approche
scientifique rigoureuse des questions pédagogiques. Non seulement il tenait à jour des
statistiques précises sur l'évolution de la qualité de nos étudiants, mais il
s'intéressait aussi de près à l'analyse de leurs motivations, à leur psychologie en
général.
Ce pédagogue aux connaissances encyclopédiques restera pour nous une des figures
attachantes du département de chimie.
Marc Van Haver
Electricien de formation, de culture néerlandophone, Marc Van Haver travaillait déjà
à l'UCL alors que celle-ci était encore installée à Leuven. Et lors du transfert, il
choisit de suivre l'université en région wallonne, tout en continuant à habiter la
Flandre. Il poursuivit dès lors toute sa carrière au sein du département de chimie.
Dans le laboratoire, Marc Van Haver était partout présent. Particulièrement adroit dans
les questions électriques et mécaniques, il s'occupait entre autres de la maintenance de
l'appareillage. Mais parfois aussi de la conception de cet appareillage. Car même à
l'ère où l'informatique a envahi les laboratoires de chimie, nos collègues chimistes
utilisent encore pour certains de leurs travaux des appareils électromécaniques conçus
et mis au point par Marc Van Haver. La production d'eau ultra-propre fait partie de
ceux-ci.
Marc Van Haver a aussi collaboré à l'encadrement des étudiants. Il a été un
collaborateur privilégié du professeur de Aguirre et, quand on connaît le niveau
d'exigence de ce dernier, tant sur le plan de la chimie qu'au niveau pédagogique, on se
rend compte que sa longue collaboration avec Marc Van Haver ne peut que souligner les
insignes mérites de ce technicien de valeur.
Marc Van Haver nous laisse le souvenir d'un homme dévoué, toujours prêt à rendre
service, toujours partant pour mettre son imagination et ses compétences au service des
chercheurs. Un homme toujours occupé, car s'il est une chose que Marc Van Haver n'a
jamais cultivée, c'est l'oisiveté.
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