Résumé :
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Cet article a pour objectif d’étudier la façon dont les modèles d’attachement de l’enfant s’expriment au niveau de ses capacités de compréhension des émotions d’autrui, en partant de l’hypothèse suivante: les représentations d’attachement insécurisées seraient associées à de pauvres compétences dans le décodage des signaux émotionnels et affecteraient spécialement l’appréhension des manifestations émotionnelles à valence négative. Nous avons rencontré quatre enfants âgés de cinq à huit ans présentant un trouble réactionnel de l’attachement et quatre sujets témoins, appariés en sexe et en âge. La tâche des histoires d’attachement à compléter nous a permis de préciser le type de trouble d’attachement des enfants du premier groupe. Nous avons ensuite administré à tous les enfants une épreuve de reconnaissance des expressions faciales émotionnelles. Nous observons au sein du groupe clinique, des performances globalement déficientes dans l’identification des émotions négatives. Mais si l’exactitude des jugements est fonction de la valence émotionnelle, elle semble aussi dépendre du modèle d’attachement de l’enfant. Plus spécifiquement, tandis que ceux qui adoptent une stratégie d’attachement désactivée tendent à éviter le traitement des émotions négatives, les enfants au style d’attachement hyperactivé se situent dans un mouvement contraire d’hypersensibilité à ces mêmes émotions. Par ailleurs, l’existence de certains patrons singuliers d’erreurs et en particulier, la place centrale tenue par la tristesse au sein de ces confusions, pourraient être le témoin d’une immaturité des capacités empathiques chez les enfants souffrant de ce trouble. Ces résultats, bien qu’obtenus ici auprès d’un petit échantillon, ouvrent néanmoins des perspectives de recherche intéressantes, tant sur le plan méthodologique, à travers une tâche expérimentale novatrice, que théorique. Celles-ci concernent notamment les difficultés qu’éprouvent ces enfants à envisager l’émotion à un niveau symbolique et les nombreuses défenses mises en place face à la vie émotionnelle, les empêchant d’accéder à la perspective de l’autre. Cela semble être à l’origine de nombreuses dysharmonies sociales qui renforcent, à leur tour, leurs carences dans la sphère affective.
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