Presque automatiquement, le jugement qu’un lecteur porte sur un écrit se transforme en une représentation de son auteur. Comme si, à l’instar de l’apparence physique, le style vestimentaire ou encore l’accent, les écrits d’une personne étaient les indicateurs de ce que l’auteur est en essence ou « en profondeur ».
Il s’agit d’une appréciation globale sur la personne qui sera parfois pertinente, parfois pas, mais pratiquement inévitable !
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Lorsque nous évoquons une posture problématique de la part du scripteur, nous envisageons principalement les lacunes suivantes :
1. Le manque de précision (portée / prise en charge)
Dans le cadre d’un discours universitaire, il est important d’être aussi nuancé que possible.
Cependant, on constate régulièrement, dans les productions d’étudiants, l’absence du ou des modalisateur(s) nécessaire(s) pour préciser au lecteur la portée du propos (voir ci-dessous pour des précisions sur le concept de modalisation).
Dire, par exemple, que « ce phénomène est extrêmement fréquent et serait particulièrement intéressant à analyser de façon plus approfondie » n’est pas équivalent à dire que « ce phénomène est fréquent et sera analysé de façon approfondie ».
De plus, on attend du scripteur qu’il soit clair par rapport à son degré de prise en charge de ce qu’il avance. En d’autres termes, assume-t-il, partiellement ou pleinement ce qu’il avance ? Si un scripteur évoque en réalité le propos (plus ou moins nuancé) de quelqu’un d’autre (auteur, professeur…) et que cela manque de clarté, il s’agit en fait plutôt d’une problème de #source. Mais s’il s’agit bien de son raisonnement/avis personnel, il convient de rendre cela explicite (par exemple : « J’estime dès lors qu’il serait sans doute prématuré de conclure que… »).
Utiliser, par exemple, des expressions assimilables à des « affirmations gratuites » (cf. #argumentation), comme « il est normal que… » ou « ceci prouve clairement que… », c’est manifester une prise en charge très personnelle du scripteur, n’admettant pas la remise en question.
Le problème de prise en charge peut se concrétiser par un « excès » (comme dans les exemples ci-dessus) ou, a contrario, par un « défaut » de prise en charge. Par exemple, il arrive que la consigne d’une question d’examen mentionne la nécessité de produire une analyse personnelle et/ou de donner son avis, mais que l’étudiant n’y réponde pas. La posture endossée n’est pas celle attendue. Par ailleurs, même si la consigne ne le précise pas explicitement, il ne faut pas perdre de vue que l’on attend généralement d’un étudiant universitaire qu’il puisse « faire sien » un contenu qu’il est censé avoir assimilé.
2. L’expression inopportune d’une certaine subjectivité
Parfois, le scripteur a explicitement « modalisé » sont discours, mais les techniques choisies ne sont pas pertinentes / sont mal utilisées. Le plus souvent, on constate que le texte est emprunt d’une subjectivité qui n’est cependant pas pertinente dans le cadre d’un discours universitaire car elle traduit un point de vue strictement personnel de l’auteur (point de vue qui a de bonnes chances de ne pas être partagé par son interlocuteur, notamment parce qu’il ne s’agit pas d’un point de vue argumenté).
Attention
Il est important de ne pas confondre « subjectivité » et « raisonnement ou avis personnel ». Si la consigne demande explicitement que l’étudiant fasse preuve d’un raisonnement original ou exprime son avis sur une question précise, cela ne dispense pas le scripteur de garder une posture objective.
Typiquement, voici ce que l’on retrouve dans des copies
* un discours emphatique / hyperbolique >> C’est l’élément le plus remarquable de son style, unique bien qu’il soit simplissime.
* des points d’exclamation >> Il n’est pas rare que des personnes interrogées refusent d’être enregistrées !
* un lexique marqué, connoté, subjectif >> un accent « bourrin » (même avec des guillemets) ; une expression douce à l’oreillle
On appelle modalisation l’ensemble des procédés qui, dans un discours, permettent de traduire le point de vue du locuteur (sa subjectivité, ses préférences, ses sensations). Toute modalisation exprime soit une certitude plus ou moins forte, soit une évaluation positive ou négative.
Parmi les procédés de modalisation, on retrouve donc :
Sources (illustrations sous licence Creative Commons) : Der Wanderer über dem Nebelmeer
[tab:En pratique]
LROM 1112 – Les accents régionaux
Une possible explication serait de dire que la société possède des stéréotypes et, par conséquent,comme beaucoup le savent#posture #argumentationIl s’agit d’une affirmation gratuite. R (supprimer)
, la région de Charleroi détient une mauvaise réputation due aux gangs et à l’insécurité qui y règne constamment#posture #argumentationIl y a à la fois une affirmation 'gratuite' et une généralisation (modalisation erronée) R … mauvaise réputation probablement générée par les récits fréquents, notamment dans les médias, évoquant la présence de gangs, par exemple, ou l’insécurité en général
. D’un autre côté, la région de la Provence est synonyme d’accueil, de chaleur voire de bien-être. Notre#source #postureOn n'est pas certain de savoir qui englobe le 'nous'. vision des différentes régions et leur appréciation prouve clairement#postureLe modalisateur 'clairement' engage le jugement personnel, non nuancé et non argumenté du scripteur R I
l semble donc que notre appréciation de différentes régions puisse avoir un impact réel sur la façon dont nous jugeons les pratiques langagières qu'on peut y observer respectivement.
qu’elles ont un impact réel sur la structure langagière.
Consulter l’analyse complète (réponse intégrale et son analyse détaillée)
[tab:« De quoi j’ai l’air ? »]
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Ce que le prof risque de griffonner, Ce que le prof risque de conclure
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hors-sujet, naïf – candide
ambigu – pas clair, prétentieux – snob
inapproprié – déplacé
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Fiche 16c – Ton trop familier ou personnel
Fiche 16d – Cherche trop à persuader – Tendancieux
Fiche 16e – Emploi abusif ou inopportun de métaphores, de formules poétiques, d’appels aux sentiments
Fiche 10f – Pas ou trop peu d’analyse personnelle / Empilage de références ou de citations
Comment savoir si on doit répondre de façon neutre, se baser sur un auteur ou donner son opinion ?
[tab: GRR]
Les scripteurs qui utilisent fréquemment ces tournures complexes semblent avoir pour objectif d’être explicites et exhaustifs. Pourtant, c’est généralement l’effet inverse qui se produit : le sens premier du passage est moins accessible car le lecteur doit faire un travail supplémentaire pour décoder des éléments qui n’apportent rien à la compréhension ou la lisibilité.
Cette étiquette peut s’appliquer à plusieurs types de constructions.
Parmi les plus fréquentes, citons la tendance à :
Bien sûr, la complexité d’une tournure peut être rendue nécessaire par une volonté de précision et reste avant tout un outil permettant d’exprimer des nuances, qui sont souvent de grande importance. Une suite de deux verbes ou de deux noms, par exemple, n’est donc pas en soi problématique ! C’est bien pour cela que le problème que nous évoquons ici est étiqueté #tournure confuse et non *tournure complexe…
In fine, il s’agira surtout de rester attentif lorsque l’on recourt à des formulations complexes, afin d’envisager des tournures alternatives, plus simples, si cette complexité risque de rendre le texte peu lisible ou si l’on n’est pas sûr de maîtriser la syntaxe de ces tournures. Par exemple, si le lecteur pressent que sa phrase est trop complexe, il peut jouer sur les verbes modaux, les noms qui se répètent, etc. pour essayer de la simplifier.
Ce problème s’apparente aussi à la mauvaise gestion de la #ponctuation. Souvent, les tournures inutilement complexes se retrouvent dans un contexte plus large de phrases très (trop) longues. C’est le cas où le scripteur a tendance à rédiger des phrases au sein desquelles il regroupe plusieurs idées, alors que chaque idée pourrait être mise en évidence de façon plus claire par une phrase séparée. On parle aussi de sous-découpage syntaxique. Le lecteur doit faire un effort de concentration pour retenir les idées et comprendre leur articulation au sein de la phrase.
Attention !
Souvent, la présence d’une longue phrase suppose celle de propositions subordonnées, enchâssées, au sein desquelles les risques d’erreurs de tous types sont également plus élevés : balisage (connecteurs non pertinents, mauvaise gestion des anaphores…), syntaxe (concordance des temps, par exemple), orthographe (accords en présence d’un pronom relatif, par exemple).
Sources (illustrations sous licence Creative Commons) : bébé sceptique
[tab:En pratique]
LROM 1360 – Le roi se meurt (Ionesco)
Le Roi se meurt présente une strate politique que nous avons pu relever dans ce textePrésence d'une proposition relative inutile ('que nous avons...'), d'un verbe modal superflu ('pu relever') et d'un démonstratif pas vraiment nécessaire ('ce texte'). R Nous avons (notamment) relevé une strate politique dans Le Roi se meurt
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Consulter l’analyse complète (réponse intégrale et son analyse détaillée)
[tab:« De quoi j’ai l’air ? »]
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Ce que le prof risque de griffonner, Ce que le prof risque de conclure
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pas clair, prétentieux – snob
trop peu lisible, naïf
lourd – fatigant, scolaire – immature
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Fiche 16a – Ton ou style inutilement savant ou compliqué
Fiche 7c – Phrase trop lourde/contient trop d’idées
Un relevé de problèmes stylistiques très fréquents, mentionnant et illustrant notamment les tournures évoquées dans « En théorie ».
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