L'abbaye Sainte-Gertrude de Louvain

Trois siècles après leur fondation en 1627, les bénédictines de la Paix Notre-Dame à Liège envoient cinq de leurs sœurs établir un monastère dans l’ancienne Abbaye de Sainte-Gertrude à Louvain. Cette Abbaye fondée par le Duc de Brabant Henri 1er en 1206 avait été occupée pendant près de quatre siècles par les Augustins de l’ordre de Saint-Victor de Paris. Les révolutionnaires les en avaient chassés en 1797. L’église abbatiale fut confiée au clergé séculier, mais garda son nom en souvenir de la chapelle consacrée à sainte Gertrude de Nivelles et édifiée sur cette terre à la fin du XIIe siècle. Divisé en trois lots, le domaine fut vendu et exploité par des particuliers à des fins profanes.

Quelques années avant la première guerre 1914-18, le chanoine Armand Thiery, professeur à l’université de Louvain et grand amateur d’art, s’émeut de voir l’état lamentable des cloîtres, des grandes salles désaffectées, de la cour d’honneur flanquée d’une usine de teinturerie. Sa fortune lui permet d’acquérir l’hectare traversé par la Dyle et borné par l’église, les rues de Malines, du Canal, de Charles de Lorraine, qui contient les bâtiments claustraux de l’ancienne Abbaye.
L’achat a lieu en 1911. Dès cette date commence la « restauration ». Le chanoine transforme les bâtiments en un musée rempli d’œuvres d’art et de matériaux d’anciennes demeures désaffectées. Il invite ses amis et des groupes de jeunes, étudiants et autres, à visiter les lieux. Une oblate du Mont-César s’enthousiasme : « Il faudrait des moniales bénédictines pour peupler cette Abbaye. » L’idée fait son chemin. Le chanoine Thiery en parle à l’abbé de Maredsous, Dom Marmion, confesseur des bénédictines de la Paix Notre-Dame à Liège et ami du Cardinal Mercier, archevêque de Malines, dont l’autorisation est requise. Le 28 août 1917, l’acte de donation est signé entre le chanoine Thiery et la Paix Notre-Dame.

Le jeudi de Pâques 24 avril 1919, les louvanistes voient arriver par l’avenue des Alliés une calèche rideaux tirés. Ce sont les cinq fondatrices du nouveau monastère. Leur installation dans la grande Abbaye est plus que précaire et la question du gagne-pain se pose rapidement avec acuité. Providentiellement l’Université ouvre ses portes aux femmes en 1920. Le Cardinal Mercier et le Recteur, Mgr Ladeuze, demandent aux bénédictines d’ouvrir une "pédagogie" pour étudiantes. Cinq féministes décidées s’y inscrivent, toutes belges, mais vite rejointes par des étrangères, principalement des russes, des chinoises. Quand l’Université ouvrira une section flamande, la pédagogie accueillera également bien des jeunes du Nord du pays.