Cycle Adrien Genoudet à La Cambre (2020-2021)


Cycle d’écriture d’Adrien Genoudet au sein de l’atelier des Ecritures contemporaines de la Cambre (dirigé par Gilles Collard) avec le soutien du groupe de l’ERC HANDLING (Anne Reverseau, FNRS/UCLouvain).

Première séance: 14 décembre 2020 (en ligne)


Malgré la situation sanitaire due au coronavirus, la première partie de la résidence de l’écrivain Adrien Genoudet (1988) a eu lieu début décembre 2020 avec une séance du séminaire La main et l’image dédié à Didi-Huberman (le 10 décembre) et la première séance de l’atelier d’écriture en partenariat avec la Cambre (le 14 décembre), le deux en format distanciel. L’atelier, dirigé par Gilles Collard, s’est nourri de la double expertise de Genoudet. Comme écrivain, mais aussi chercheur en histoire visuelle, le jeune français a présenté aux élèves un projet pour les prochains mois : l’écriture de plusieurs récits ou nouvelles depuis le vaste répertoire visuel des Archives de la Planète d’Albert Kahn. Ce banquier alsacien (1860-1940), comme l’a expliqué Genoudet, a consacré une partie de sa fortune amassée lors de l’expansion coloniale de la Troisième République à la construction d’une archive photographique et filmique qui fait l’état des lieux d’un monde en train de disparaître. Le résultat est donc une collection de 4000 photos et films pris entre 1909 et 1931 dans les cinq coins du monde, en grande partie déjà numérisée et aujourd’hui conservée au musée Albert Kahn des Hauts-de-Seine, actuellement en travaux mais qui devrait rouvrir en 2021. Le musée, explique Genoudet, offre des « images prêtes à l’emploi » et est ouvert à ce genre de tentatives de partage : une collection de livres sur et à partir de ce fonds d’archive est même prévue.

Genoudet a déjà travaillé sur les archives Kahn pour sa thèse de doctorat en histoire, adaptée sous la forme d’un essai qui vient de paraître, L’Effervescence des imagesIl a aussi travaillé avec des images d’archive dans son roman L’étreinte (2017). Il a expliqué lors de l’atelier comment les images de cette vaste archive, parfois anodines de bâtiments historiques ou de vie quotidienne de paysans, peuvent être une source d’écriture. Il parle même de « promesse ». Selon Genoudet, l’archive Kahn incarne ce qu’il a appelé l’ « effervescence des images », notion qui prend, selon lui, 4 aspects : 

  1. La dispersion des images dans un temps historique. 
  2. La dilution discursive (Foucault) entre le sens initial et celui de sa mise en discours. Dans le cas des Archives de la Planète, cette genèse a la forme d’une représentation ethnographique et positiviste du monde au début du XXème siècle. Cependant, ce sens est destiné à changer, à se métamorphoser lorsque son public évolue. Ce que Kahn et leurs contemporains ont vu dans ces photos et films est différent de ce que la génération suivante en a aperçu et de ce que nous, un siècle plus tard, repérons. 
  3. La métamorphose, matérielle, des images, le fait qu’on les saisisse sous des formats et dans des contextes très différents
  4. La performance : leur effet sur nous. 

C’est dans cet écart que la littérature a lieu. En montrant l’extrait d’un film d’une rue de prostituées au Maroc, Genoudet a évoqué la possible fictionnalisation des images. Si les images d’un groupe de soldats en train de harceler un groupe de prostituées nous gênent aujourd’hui, elles nous ouvrent l’espace pour deviner dans les gestes les motifs et la vie interne de personnages qui ne sont pas très différents de nous et ainsi les développer depuis une perspective contemporaine.

Très motivés par le projet proposé par Genoudet, les élèves de l’Atelier des Écritures Contemporaines de la Cambre vont travailler dans les prochains mois sur une sélection d’images des Archives de la Planète et commencer à écrire à partir d’elles au printemps 2021.      

En répondant aux questions diverses des étudiants sur le déroulé de l’atelier et notamment le « comment faire ? », Genoudet a insisté sur la valeur des impressions premières, de la surprise face à une photographie : il a appelé à « être aux aguets de ses premiers sentiments » quand on se trouve face à des images. 

Compte rendu rédigé par Andrés Franco Harnache en janvier 2021

Visionnez ici la vidéo d’Adrien Genoudet « Penser avec les mains »

Deuxième séance: 15 février 2021 (en ligne)

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