Séminaire de philosophie des sciences humaines [ LFILO2940 ]

Théorie réflexive de l'action collective : du pragmatisme philosophique à la phénoménologie radicale

L'émergence de diverses formes d'action collectives non étatiques autour d'expériences d'autorégulation, d'associations et fédérations internationales, ainsi qu'autour d'instances de négociation collective entre usagers et producteurs de biens publics, a bouleversé les concepts classiques d'analyse de nos institutions. Sur le plan pratique, les formes d'action collective « décentralisée » et « distribuée » jouent un rôle de plus en plus important dans la gouvernance d'objets complexes comme l'Internet, la biodiversité ou les droits fondamentaux. Ceci est reflété tant dans la philosophie politique contemporaine, que dans le tournant institutionnel dans différentes disciplines des sciences sociales et humaines allant de l'économie à l'histoire.

L'objet du cours sera d'analyser l'action collective « décentralisée » et « distribuée » qui a émergé autour des biens communs globaux. D'abord elle présentera le nouveau cadre épistémologique d'analyse du rôle et du fonctionnement de l'action collective qui a émergé dans la recherche contemporaine en philosophie des sciences sociales et humaines. Ce cadre définit des nouveaux modes d'évaluation de la production de nouvelles normes, basés tant sur la critique pragmatisme que sur les développements contemporains en phénoménologie radicale. Ensuite, des champs particuliers de production de biens feront l'objet d'études de cas. Cette partie plus appliquée empruntera aux  analyses des années 1980 des organisations de concertation sociale et des organisations non gouvernementales, mais abordera également la littérature plus récente autour du capital social, des régimes de ressources communes et de la production de contenu sur Internet par les pairs (« peer production »).

Thèmes abordés

• 1. Introduction : le rôle des acteurs collectifs non-étatique dans la gouvernance
• 2. Obstacles pour la reconstruction de l'action collective
  • Obstacles juridiques liés à la privatisation des ressources
  • Obstacles sociaux
• 3. Options / modèles pour aller au-delà de cette situation
  • Formes de contrôle vertical de la démocratie représentative : acteurs de la société civile et observatoires d'action gouvernementale
  • Formes horizontales d'autogestion: gouvernance en réseau, organisations intermédiaires et biens communautaires (commons)
• 4. La validité du jugement normatif et le rôle de l'attention réflexive dans la gouvernance participative
  • La critique pragmatiste du positivisme
  • Le niveau de la compréhension pragmatiste de la validité du jugement
  • L'approfondissement phénoménologique de l'examen de validité
  • La perspective génétique en théorie de la gouvernance
• 5. Implications de la critique épistémologique sur la programmation de la recherche

Portefeuille de lecture du cours

• TEXTE 1 : Dedeurwaerdere, T. 2007. Théories de la gouvernance et société de l'information : introduction.
• TEXTE 2 : Putnam, H. Fait/Valeur. Chapitre 2 : L'enchevêtrement des faits et des valeurs, pp. 37-54.
• TEXTE 3 : Husserl, E. 1972 (ed. originale 1923-1924). Philosophie Première 1 : le positivisme de Hume, pp. 226-232.
• TEXTE 4 : Husserl, E. 1972 (ed. originale 1923-1924). Philosophie Première 2 : le second chemin de l'ouverture de la sphère d'expérience transcendantale, pp. 203-211.
• TEXTE 5 : Lenoble, J. et M. Maesschalck. Synthesis Report 2. Gouvernance Réflexive : quelques clarifications et approfondissements de la quatrième approche (approche génétique), pp. 14-19.
• TEXTE 6 : Tom Dedeurwaerdere et Marc Maesschalck, 'Autorégulation, éthique procédurale et gouvernance de la société de l'information', in Les Carnets du Centre de Philosophie du Droit, n°91, 2001.
• TEXTE 7 : Tom Dedeurwaerdere, 'Bioprospection, gouvernance de la biodiversité et mondialisation', in Les Carnets du Centre de Philosophie du Droit, n°104, 2003.
• TEXTE 8 : Dedeurwaerdere, T.  2010. The Contribution of Network Governance to overcoming frame conflicts.

Références complémentaires utilisées dans le cours

• Anheir, H.K. 2005. Nonprofit organizations. Theory, management, policy. Abingdon: Routledge.
• Hunold Ch. and Dryzek, J. 2005. Green Political Strategy and the State: Combing Political Theory and Comparative History. In: The State and the Global Ecological Crisis, ed. J. Barry and R. Eckersley. MIT Press, pp. 75-96.
• Keane, J. 2009. The life and death of democracy. New York: Norton.
• Malena, C. 2009. From political won't to political will. Building support for participatory governance. Sterling, VA: Kumarian Press.
• Ostrom, E. 2007. Understanding Institutional Diversity. Princeton: Princeton university Press.
• Putnam, H. 2004. Ethics without ontology. Harvard : Harvard University Press.
• Von Weizsäcker E.U., O. Young, and M. Finger. 2005. Limits to Privatization. How to avoid too much of a good thing. London : Earthscan

Pré-requis: Le cours suppose une connaissance au moins passive de l'anglais suffisante pour pouvoir lire des textes courants en philosophie des sciences humaines.

Evaluation: L'évaluation portera sur la communication écrite rédigée par l'étudiant et sur sa participation à la dynamique du séminaire.