Papillomatose laryngée

La prévalence dans la population générale est estimée entre 1 et 4 cas pour 100.000 personnes. Lésions tumorales récidivantes dorigine virale (papillomavirus de type herpès types 6 et 11 surtout) au niveau du larynx. L'âge moyen du diagnostic est de 4 ans mais certains cas apparaissent déjà chez le nourrisson : les pics de diagnostic sont entre 2 et 5 ans et entre 20 et 30 ans, avec une prédominance masculine.  Les mères des enfants atteints présentent des signes histologiques et cytologiques d'infection génitale au virus. On attend de la généralisation de la vaccination des fillettes de 11-12 ans une forte diminution de l'incidence de cette pathologie dévastatrice et de ses complications oncologiques (cancers cervicaux notamment).

L'ADN viral provoque une prolifération épithéliale au niveau du larynx, ce qui se traduit par une dysphonie progressive, un stridor et/ou une obstruction respiratoire progressive (dyspnée laryngée, toux chronique, parfois apnées obstructives du sommeil ou dysphagie) dont le diagnostic est fait par l'endoscopie. De nombreux traitements médicamenteux, plus ou moins agressifs, ont été utilisés (interféron, acyclovir, ribavirine, cidofovir, anti-Cox2, rétinoïdes, médicaments anti-reflux, zinc, indole-3-carbinol, etc.) mais sur une base individuelle de cas cliniques, ce qui ne permet pas de proposer de recommandations claires d'utilisation. Le plus souvent, on recourt à des traitements endoscopiques répétés, eux aussi variés : cautérisation thermique, cryochirurgie, ablation à la pince, mais la méthode la plus communément adoptée est le débridement sous microlaryngoscopie en suspension qui est préféré au traitement par laser CO2. La classification de Derkay est utilisée pour décrire lextension de latteinte laryngée.




                       Classification de Derkay


La réalisation du geste pose des problèmes techniques importants du fait de l'obstruction laryngée et/ou trachéale par la tumeur : il y a un risque majeur de difficultés de ventilation et dintubation. La plupart des chirurgiens ORL préfèrent que l'enfant ne soit pas intubé avec une sonde trachéale spécifique protégée mais soit maintenu en ventilation spontanée en plaçant :

-         soit une sonde en sus-glottique (ou une sonde nasopharyngée)

-        soit un cathéter veineux central 7 F à 2 voies en transglottique, de manière à pouvoir mesurer le CO2 téléexpiratoire par une des deux voies

La jet-ventilation entraîne un risque (non documenté) de diffusion de débris tissulaires et de particules virales potentiellement infectantes dans le reste de l'arbre respiratoire et dans la salle dopération, et nest plus recommandée.

Les interventions sont répétées en fonction de la vitesse de prolifération épithéliale et de la gêne respiratoire quelle provoque. On considère que la papillomatose est très agressive si lenfant nécessite plus de 3 à 4 interventions par an. Le bevacizumab, un inhibiteur du facteur endothélial vasculaire, est utilisé en complément de la chirurgie dans les cas qui répondent mal à la chirurgie ou en cas datteinte pulmonaire. Il arrive quune trachéotomie soit nécessaire. La diffusion bronchique distale ou parenchymateuse de la lésion représente une forme de gravité de l'affection qui peut mettre en jeu le pronostic vital.


Implications anesthésiques

endoscopies répétées (50% des cas nécessitent plus de 10 interventions).

Risque majeur de difficultés :

-        de ventilation : maintenir la ventilation spontanée, risque dobstruction des voies aériennes supérieures (diminution du tonus des muscles dilatateurs du pharynx), risque dobstruction de la sonde endotrachéale ou de la trachée si des débris de tumeur sont détachés durant lintubation, risque de collapsus de reventilation en cas dintervention sur un enfant qui se présente en insuffisance respiratoire

-        dintubation : prévoir différents types de sonde et un bronchoscope.

-        et de laryngospasme à linduction, durant la procédure et au réveil.


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Mise-à-jour décembre 2019