[MIM 615 861]
(néphrose)
Maladie rénale la plus fréquente de l’enfant : 2 à 7cas/100.000 enfants/an. 70% des cas débutent avant l’âge de 5 ans.
La triade diagnostique est :
- protéinurie > 50 mg/kg/jour, avec des urines d’aspect moussant
- hypoprotéinémie
- oedèmes généralisés, mous, non douloureux : dus à la rétention de Na et à la diminution de la pression oncotique plasmatique.
C’est le résultat d’une fuite massive de protéines par voie urinaire. La physiopathologie est variable et mal connue :
- une dysfonction immunitaire ; des modifications au niveau des podocytes des glomérules sont retrouvées au microscope électronique
- une pathologie glomérulaire de cause variée : immunologique [MIM 612 551] ou infectieuse
- une anomalie constitutionnelle de la barrière de filtration : mutation de gènes impliqués dans la structure ou la fonction des podocytes : NPHS1, NPHS2 (1q25-q31), LAMB2 [MIM 614 194], ACTN4, TRPC6, WT1 (formes cortico-résistantes). La probabilité d’une cause génétique est d’autant plus grande que le début de la maladie est précoce (< 1 an)
- la présence d’un facteur circulant qui altère la perméabilité de la barrière de filtration : héparanase, hémopexine, angiopoietin-like 4 (ANGPTL4), cardiotrophin-like cytokine 1, soluble urokinase plasminogen activator receptor (suPAR).
Le syndrome néphrotique est dit « pur » s’il n’est pas accompagné d’hypertension artérielle, d’hématurie ou d’insuffisance rénale. Il est dit cortico-sensible s’il répond à une corticothérapie en moins de 4 semaines, avec un risque variable de rechute lors de l’arrêt du traitement, ou cortico-résistant avec un risque important d’évolution vers l’insuffisance rénale chronique [MIM 256 370, 600 995, 603 278, 607 832, 610 725, 613 237, 614 196, 615 244, 615 573, 615 861, 616 002, 616 032, 616 220, 616 730, 616 893]
La forme la plus fréquente est le syndrome néphrotique primitif idiopathique dont l’image histologique à la biopsie est soit:
- une glomérulopathie à lésions glomérulaires minimes (« minimal changes ») [MIM 614 196] : corticosensible dans 90 % des cas
- une prolifération mésangiale diffuse [MIM 614 196]
- ou une glomérulosclérose (ou hyalinose) segmentaire et focale [MIM 603 278, 614 196]: corticosensible dans 20 % des cas.
Le début en est souvent brutal, au décours d’une infection virale. Cette affection est plus fréquente chez le garçon. Il semble exister une prédisposition génétique pour les formes cortico-sensibles : polymorphisme des HLA-DQA1 et HLADQB1.
Les formes moins fréquentes, non-idiopathiques, sont :
- les maladies génétiques rares : Alport, Frasier, Pierson, nail-patella, Denys-Drash, Galloway-Mowat, syndrome néphrotique de type finnois,
- celles secondaires à une glomérulonéphrite immunologique : glomérulonéphrite extramembraneuse ou membranoproliférative (en général « impur »), anémie falciforme
- celles secondaires à une maladie générale : purpura rhumatoïde, lupus (en général « impur »)
- celles associées à une prise médicamenteuse : AINS, D-pénicillamine, biphosphonates, rifampicine
- celles secondaires à une infection : périnatale (CMV, toxoplasmose, rubéole) ou plus tardive (hépatite B ou C, HIV1, malaria, varicelle)
- celles secondaires à une affection maligne : thymome, lymphome, leucémie
Le traitement est :
- régime sans sel, restriction hydrique
- corticothérapie durant 8 à 12 semaines avec une dose de départ de 60 mg/m2/jour. En cas de corticosensibilité, la protéinurie diminue en 1 à 2 semaines. Cependant, 60% des cas corticosensibles font au moins une rechute qui nécessite une reprise de la corticothérapie. Ces rechutes sont souvent précédées d’un épisode infectieux
- en cas de corticorésistance, des immunosuppresseurs : lévamisole (antihelminthique aux propriétés immunomodulatrices), cyclophosphamide, ciclosporine, tacrolimus, mycophénolate, rituximab, mizoribine
- dans certains cas, on ajoute un inhibiteur de l’enzyme de conversion ou un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine 2 pour diminuer la protéinurie, surtout si une HTA est associée.
- parfois, perfusion d’albumine ; diurétiques avec prudence (aggravent l’hypovolémie).
Les complications du syndrome néphrotique sont :
- les infections par diminution du taux d’IgG : notamment, péritonité bactérienne spontanée (Str pneumoniae), pneumonie (Str pneumoniae, H influenzae, St aureus…)
- la thrombose : en général veineuse, plus rarement artérielle suite à la thrombocytose et diminution du taux d’antithrombine III, de protéine C et S, à des troubles de la fibrinolyse
- l’anémie
- l’hyperlipémie : cholestérol, triglycérides et ses complications cardiovasculaires
- l’insuffisance rénale aiguë, dans un contexte d’hypovolémie, de sepsis ou de néphrite interstitielle sur AINS, ou chronique en cas de corticorésistance
- les complications de la corticothérapie.
Implications anesthésiques:
vérifier l’ionogramme, la créatininémie, l’hémogramme ; corticothérapie substitutive en cas de traitement par cortisone ; difficultés d’abord veineux ; risque de thrombose (accès veineux central) ; antibioprophylaxie. Le syndrome néphrotique est la seule situation où l’hypoalbuminémie n’est pas compensée par une augmentation d’α1 -glycoprotéine : l'existence d'un syndrome néphrotique entraîne donc une diminution importante de la liaison protéique des anesthésiques locaux.
Références :
- Greff B, Faivre J, Carli PA, Niaudet P, Orliaguet GA.
Intra- and postoperative adverse events in children with nephrotic syndrome requiring surgery under general anesthesia.
Pediatr Anesth 2012, 22: 244-9
- Noone DG, Iijima K, Parekh R.
Idiopathic nephrotic syndrome in children.
The Lancet 2018, 392; 10141: 61-74
Mise-à-jour: juillet 2018