(néphrose)
Maladie rénale la plus fréquente de l’enfant : 2 à 7cas/100.000 enfants/an. 70% des cas débutent avant l’âge de 5 ans.
La triade diagnostique est :
- protéinurie > 50 mg/kg/jour, avec des urines d’aspect moussant
- hypoprotéinémie
- oedèmes généralisés, mous, non douloureux : dus à la rétention de Na et à la diminution de la pression oncotique plasmatique.
C’est le résultat d’une fuite massive de protéines par voie urinaire. La physiopathologie est variable et mal connue :
- une dysfonction immunitaire ; des modifications au niveau des podocytes des glomérules sont retrouvées au microscope électronique
- une pathologie glomérulaire de cause variée : immunologique [MIM 612 551] ou infectieuse
- une anomalie constitutionnelle de la barrière de filtration :
d’un point de vue génétique, on distingue :
- NPHS1 [MIM 256 300], dû à une mutation du gène NPHS1 (19q13.12) qui encode la néphrine, qui donne le syndrome néphrotique de type finlandais (voir ce terme)
- NPHS2 [MIM 600 995], mutation du gène de la podocine (1q25-q31)
- NPHS3 [MIM 610 725], mutation du gène PCLE1 (10q23.33)
- NPHS4 [MIM 256 370], mutation du gène WT1 (11p13), associée au syndrome de Denys-Drash
- NPHS5 [MIM 614 199], mutation du gèn LAMB2 (3p21.31) qui peut également provoquer le syndrome de Pierson
- NPHS6 [MIM 614 196], mutation du gène PTPRO (12p12.3)
- NPHS7 [MIM 615 008], mutation du gène DGKE (17q22), qui peut également être associé à l’apparition d’un syndrome urémique-hémolytique atypique du nourrisson
- NPHS8 [MIM 615 244], mutation du gène ARHGDIA (17q25.3)
- NPHS9 [MIM 615 573], mutation du gène COQ8B (19p13.2)
- NPHS10 [MIM 615 861], mutation du gène EMP2 (16p13.13)
- NPHS11 [MIM 616 730], mutation du gène NUP107 (12q15), dont d’autres mutations sont associées au syndrome de Galloway-Mowat
- NPHS12 [MIM 616 892], mutation du gène NUP93 (16q13)
- NPHS13 [MIM 616 893], mutation du gène NUP205 (7q33)
- NPHS14 [MIM 615 575], ou syndrome RENI (acronyme de Renal Endocrine Neurologic Immune) dû à une mutation du gène SGPL1 (10q22.1)
- NPHS15 [MIM 617 609], mutation du gène MAGI2 (7q21.11)
- NPHS16 [MIM 617 783], dû à une mutation du gène KANK2 (19p13.2)
- NPHS17 [MIM 618 176], dû à une mutation du gène NUP85 (17q25.1)
- NPHS18 [MIM 618 177], dû à une mutation du gène NUP133 (1q42.13) qui peut être associée au syndrome de Galloway-Mowat
- NPHS19 [MIM 618 178], dû à une mutation du gène NUP160 (11p11.2)
- NPHS20 [MIM 301 028], dû à une mutation du gène TBC1D8B (Xq22.3)
- NPHS21 ou NPHS 25 [MIM 618 594], dû à une mutation du gène AVIL (12q14.1)
- NPHS22 [MIM 619 155], dû à une mutation du gène NOS1AP (1q23.3)
- NPHS23 [MIM 619 201], dû à unne mutation du gène KIRREL1 (1q23.1)
- NPHS24 [MIM 619 263], dû à ue mutation du gène DAAM2 (6p21.2)
- NPHS26 [MIM 620 049], dû à une mutation du gène LAMA5 (20q13.33)
Etant donné qu’il y a une confusion dans la littérature entre syndrome néphrotique (description clinique) et glomérulosclérose focale segmentaire (image histologique d’une cause fréquente de syndrome néphrotique) d’autres causes génétiques ont été classées sous l’acronyme FSGS (focal segmental glomerulosclerosis). Ce sont:
- FSGS1 [MIM 603 278], mutation du gène ACTN4 (19q13.2)
- FSGS2 [MIM 603 965], mutation du gène TRPC6 (11q22.1)
- FSGS3 [MIM 607 832], mutation du gène CD2AP (6p12.3)
- FSGS4 [MIM 612 551], mutation du gène APOL1 (22q12.3)
- FSGS5 [MIM 613 327], mutation du gène INF2 (14q32.33)
- FSGS6 [MIM 614 131], mutation du gène MYO1E (15q22.2)
- FSGS7 [MIM 616 002], mutation du gène PAX2 (10q24.31)
- FSGS8 [MIM 616 302], mutation du gène ANLN (7p14.2)
- FSGS9 [MIM 616 220], mutation du gène CRB2 (9q33.3)
La probabilité d’une cause génétique est d’autant plus grande que le début de la maladie est précoce (< 1 an d'âge). La majorité de ces causes ne concerrnent que quelques familles.
- la présence d’un facteur circulant qui altère la perméabilité de la barrière de filtration : héparanase, hémopexine, angiopoietin-like 4 (ANGPTL4), cardiotrophin-like cytokine 1, soluble urokinase plasminogen activator receptor (suPAR).
Le syndrome néphrotique est dit 'pur' s’il n’est pas accompagné d’hypertension artérielle, d’hématurie ou d’insuffisance rénale.
Il est dit 'cortico-sensible' s’il répond à une corticothérapie en moins de 4 semaines, avec un risque variable de rechute lors de l’arrêt du traitement, ou cortico-résistant avec un risque important d’évolution vers l’insuffisance rénale chronique.
La forme la plus fréquente est le syndrome néphrotique primitif idiopathique dont l’image histologique à la biopsie est soit:
- une glomérulopathie à lésions glomérulaires minimes (« minimal changes ») (NPHS6) : corticosensible dans 90 % des cas
- une prolifération mésangiale diffuse (NPHS6)
- ou une glomérulosclérose (ou hyalinose) segmentaire et focale (NPHS6 ou FSGS 1): corticosensible dans 20 % des cas.
Le début en est souvent brutal, au décours d’une infection virale. Cette affection est plus fréquente chez le garçon. Il semble exister une prédisposition génétique pour les formes cortico-sensibles : polymorphisme des HLA-DQA1 et HLADQB1.
Les formes moins fréquentes, non-idiopathiques, sont :
- les maladies génétiques rares : Alport, Frasier, Pierson, nail-patella, Denys-Drash, Galloway-Mowat, syndrome néphrotique de type finlandais,
- celles secondaires à une glomérulonéphrite immunologique : glomérulonéphrite extramembraneuse ou membranoproliférative (en général 'impur'), anémie falciforme
- celles secondaires à une maladie générale : purpura rhumatoïde, lupus (en général 'impur')
- celles associées à une prise médicamenteuse : AINS, D-pénicillamine, biphosphonates, rifampicine
- celles secondaires à une infection : périnatale (CMV, toxoplasmose, rubéole) ou plus tardive (hépatite B ou C, HIV1, malaria, varicelle)
- celles secondaires à une affection maligne : thymome, lymphome, leucémie
Le traitement est :
- régime sans sel, restriction hydrique
- corticothérapie durant 8 à 12 semaines avec une dose de départ de 60 mg/m2/jour. En cas de corticosensibilité, la protéinurie diminue en 1 à 2 semaines. Cependant, 60% des cas corticosensibles font au moins une rechute qui nécessite une reprise de la corticothérapie. Ces rechutes sont souvent précédées d’un épisode infectieux
- en cas de corticorésistance, des immunosuppresseurs : lévamisole (antihelminthique aux propriétés immunomodulatrices), cyclophosphamide, ciclosporine, tacrolimus, mycophénolate, rituximab, mizoribine
- dans certains cas, on ajoute un inhibiteur de l’enzyme de conversion ou un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine 2 pour diminuer la protéinurie, surtout si une HTA est associée.
- parfois, perfusion d’albumine ; diurétiques avec prudence (aggravent l’hypovolémie).
Les complications du syndrome néphrotique sont :
- les infections par diminution du taux d’IgG : notamment, péritonité bactérienne spontanée (Str pneumoniae), pneumonie (Str pneumoniae, H influenzae, St aureus…)
- la thrombose : en général veineuse, plus rarement artérielle suite à la thrombocytose et diminution du taux d’antithrombine III, de protéine C et S, à des troubles de la fibrinolyse
- l’anémie
- l’hyperlipémie : cholestérol, triglycérides et ses complications cardiovasculaires
- l’insuffisance rénale aiguë, dans un contexte d’hypovolémie, de sepsis ou de néphrite interstitielle sur AINS, ou chronique en cas de corticorésistance
- les complications de la corticothérapie.
Implications anesthésiques:
vérifier l’ionogramme, la créatininémie, l’hémogramme ; corticothérapie substitutive en cas de traitement par cortisone ; difficultés d’abord veineux ; risque de thrombose (accès veineux central) ; antibioprophylaxie. Le syndrome néphrotique est la seule situation où l’hypoalbuminémie n’est pas compensée par une augmentation d’α1 -glycoprotéine : l'existence d'un syndrome néphrotique entraîne donc une diminution importante de la liaison protéique des anesthésiques locaux.
Références :
- Greff B, Faivre J, Carli PA, Niaudet P, Orliaguet GA.
Intra- and postoperative adverse events in children with nephrotic syndrome requiring surgery under general anesthesia.
Pediatr Anesth 2012, 22: 244-9
- Noone DG, Iijima K, Parekh R.
Idiopathic nephrotic syndrome in children.
The Lancet 2018, 392; 10141: 61-74
Mise-à-jour: janvier 2025