Morquio, maladie de
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[MIM 252 300, 253 000, 253 010]
(Mucopolysaccharidose type IV, syndrome de Morquio-Brailsford)
Incidence: 1/76.000 (Irlande) à 1/640.0000 (Australie).
Transmission autosomique récessive.
Manifestations qui apparaissent entre 1 et 3 ans :
Traitement de la forme IVA: élosulfase alpha en IV 1x/semaine, parfois greffe de cellules souches hématopoïétiques. Le traitement est le plus efficace s’il est initié avant l’âge de 2 ans mais les atteintes oropharyngée, pulmonaire et cardiaque continuent de progresser.
Implications anesthésiques:
1) préopératoire: échographie cardiaque, examens ORL (nasofibroscopie, polysomnographie), IRM médullaire, CT scan du cou et de l’arbre trachéobronchique (à partir de 7 ans)
Un score d’évaluation des voies aériennes a été élaboré pour les patients adolescents et adultes (même traités) souffrant d’une mucopolysaccharidose: le score de Salford (table). Il comprend 15 paramètres qui sont gradés de 0 à 3. Les paramètres 1-6 sont basés sur l’examen clinique, 7-10 sur l’endoscopie par voie nasale, 11-13 sur le scanner thoracique et 14-15 sur les tests de fonction respiratoires (pas toujours réalisables).
Un score total de 0-15 indique une atteinte mineure, de 15-30 une atteinte modérée et de 30-45 une atteinte sévère des voies aériennes. Un score ≥ 25 signifie qu’il faut prévoir une prise en charge difficile des voies aériennes.
numéro |
paramètre |
mesures |
score |
1 |
Ouverture de bouche |
> 5 cm 4-5 3-4 < 3 |
0 1 2 3 |
2 |
Protrusion des dents (profil) |
aucune mineure modérée sévère |
0 1 2 3 |
3 |
Mobilité /stabilité de la colonne cervicale |
non limitée 60-90° en flexion 30-60° en flexion < 30° ou instable |
0
|
4 |
Grosseur de la langue |
normale légère (<1/3 du plancher) modérée (1/3 à ½ de la cavité orale) importante (>1/2 de la cavité orale) |
0 1 2 3 |
5 |
Score de Mallampati |
1 2 3
|
0
|
6 |
Distance thyromentale |
> 6 cm 5-6 4-5 < 4 |
0 1
|
7 |
Distance épiglotte/ voile du palais |
> 4 cm 3-4 2-3 < 2 |
0
|
8 |
Volume épiglotte |
normal (remplit < 1/3 oropharynx) moyen (1/3 à ½ de l’oropharynx) modéré (1/2 de l’oropharynx) sévère (remplit tout l’oropharynx) |
0
|
9 |
Infiltration sus-glottique |
normal (remplit < 1/3 du laryngopharynx) moyen (1/3 à ½ ) modéré (1/2 ) sévère (remplit tout le laryngopharynx) |
0
1
|
10 |
Infiltration glottique |
normal (remplit < 1/3 de la glotte) moyen (1/3 à ½ de la glotte) modéré (1/2 de la glotte) sévère (remplit toute la glotte) |
0
|
11 |
Diamètre sous-glottique au cricoïde |
> 7 mm 6-7 5-6 > 5 |
0
2 3 |
12 |
Trachéomalacie ou sténose trachéale |
pas de sténose diminution de 50-75 % diminution de 75-99 % obstruction complète |
0
|
13 |
Tortuosité trachéale |
aucune présente |
0 3 |
14 |
Volume expiratoire max 1 sec |
> 80 % 60-79 40-59 < 40 |
0 1 2 3 |
15 |
Capacité vitale |
> 80 % 60-79 40-59 < 40 |
0 1 2 3 |
2) périopératoire: intubation et ventilation au masque difficiles car macroglossie, cou court et instabilité C1-C2 avec risque de paraplégie : il faut positionner la tête et le cou en position neutre (la flexion aggrave l’obstruction) de manière à ce que le conduit auditif externe soit aligné sur la clavicule (petit rouleau sous les épaules, sans rond de tête). L’intubation est encore plus difficile après la réalisation d’une arthrodèse cervicale. Laryngo- et trachéomalacie progressives ; chez le patient plus âgé, la trachée a un diamètre irrégulier et peut présenter des coudures. Syndrome restrictif. Apnées obstructives : utiliser une sonde nasopharyngée (attention au risque d’épistaxis) plutôt qu'une canule oropharyngée. Insuffisance aortique. Insuffisance coronarienne. Expérience positive avec le masque laryngé pour guider une intubation fibroscopique ou le Glidescope®. En cas de laryngoscopie directe ou indirecte, une traction sur la langue (pince de Magill) facilite l’insertion de la lame dans la cavité buccale et la laryngoscopie. Il faut prévoir une sonde d’intubation dont la taille est plus fine (de 2 à 3 tailles!) que prévu pour l’âge.
Etant donné le risque de paralysie postopératoire suite à une ischémie médullaire consécutive au positionnement du patient ou à une hypotension, un monitorage de la fonction médulaire (potentiels évoqués sensoriels et moteurs) lors de toute intervention même à distance du rachis en cas de:
- cyphoscoliose d’un angle > 60°
- chirurgie durant > 90 min ou comportant un risque d’instabilité hémodynamique
- cyphoscoliose d’un angle < 60° et chirurgie durant > 90 min ou comportant un risque d’instabilité hémodynamique. Il est important d’obtenir des valeurs de base de ces potentiels aaprès l’induction de l’anesthésie et avant de modifier la position du patient.
3) Bloc neuraxial : le rapport bénéfice-risque d’un bloc péridural doit être évalué avec prudence car la moelle épinière est fragilisée : canal rachidien étroit par accumulation de glycosaminoglycans dans les structures ligamentaires et platyspondylie avec un risque de compression mécanique (changement de position sous anesthésie), d’hypoperfusion en cas d’hypotension artérielle ou d’injection péridurale.
4) postopératoire: extubation à l’éveil complet; surveillance respiratoire, cardiaque et neurologique
CONSENSUS d’expert pour la prise en charge:
La morbi-mortalité chirurgicale est plus élevée que dans la population normale et le risque de complications anesthésiques est très élevé : ces patients doivent donc être pris en charge dans des centres qui peuvent prendre en charge des complications vitales. C’est pourquoi : - un examen neurologique complet est nécessaire avant une AG ou une ALR - une imagerie (IRM ou CT scan) de toute la colonne vertébrale est recommandée, - une IRM en flexion/extension de la colonne cervicale est nécessaire s’il y a un doute sur la stabilité de celle-ci - une polysomnographie, des tests fonctionnels respiratoires (syndrome restrictif et ou obstructif) et une évaluation cardiaque (échographie) doivent être considérés avant une anesthésie - des anomalies morphologiques et fonctionnelles des voies aériennes supérieures, une diminution de la mobilité de la colonne cervicale et des anomalies trachéo-bronchiques augmentent la morbi-mortalité de l’anesthésie - une prémédication sédative peut être administrée avant une anesthésie - pour l’intubation, il faut avoir à disposition immédiate un vidéolaryngoscope et un fibroscope d’intubation - une trachéotomie peut être extrêmement difficile à réaliser chez ces patients, surtout en urgence ; il est important de repérer la position de la membrane cricothyroïdienne ( RX, échographie) avant l’anesthésie - l’extubation doit être de préférence réalisée en salle d’opération ; si ce ne peut être le cas, une équipe expérimentée doit être présente - chez les patients chez qui une fragilité de la moëlle épinière est possible (rachi à risque : cyphose importante, risque d’hypotension, chirurgie de longue durée, positionnement chirurgical difficile) un monitorage neurologique doit être réalisé durant toute procédure chirurgicale, et il est prudent d’éviter l’anesthésie péridurale Référence:
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Références :
Mise-à-jour février 2024