Epidermolyses bulleuses

Prévalence : 1/1x106 naissances vivantes. Fragilité de la peau qui forme des bulles quand elle est soumise à une force de friction  ou de cisaillement, ou à un traumatisme mineur. Plus de 20 formes ont été décrites. Un groupe d’experts internationaux les a classifiées en 4 types selon le plan de la peau où se produit l’érosion ou la bulle : couche basale (épidermolyses simples), couche claire (épidermolyses jonctionnelles), couche dense (épidermolyses dystrophiques) ou plusieurs niveaux (syndrome de Kindler). Il est très difficile de faire un diagnostic précis (microscopie électronique, immunofluorescence, mutations) en période néonatale.



On distingue plus précisément :

couche

nom

transmission

autosomique

Ancien nom

bulles

Atteinte extracutanée



léthale acantholytique

Récessive



-

suprabasale

déficience en phakoline

Récessive


non : érosions superficielles

-


EBS superficielle

Récessive



-


EBS localisée

Dominante

Cockayne-Weber

++++
paumes et plantes

-


Dowling-Meara (DM)

Dominante


++++

aspect herpétiforme des bulles

-

parfois atteinte oropharyngée


généralisée non-DM

Dominante

Koebner

++++

-

basale

avec pigmentation

Dominante


++++

-


avec dystrophie musculaire

Récessive


++++

-

dystrophie tardive


avec atrésie pylore

Récessive


++++

-


autosomique récessive

Récessive


+++

-

anémie, retard croissance


Ogna

Dominante


+++

-


circinée migratoire

Dominante


++++

-




On y distingue :


types

nom

bulles

atteintes extracutanées

pronostic

vital


Herlitz


épidermolyse atrophiante léthale 

 ou de Herlitz


++++

anémie

anomalies ongles

retard de croissance

hypoplasie émail

atteintes digestive, respiratoire, oculaire, urogénitale

pseudosyndactylies

mauvais



épidermolyse atrophiante dite bénigne (non-Herlitz) 

ou

généralisée


++++

anémie

anomalies ongles

retard de croissance

hypoplasie émail

atteintes digestive, respiratoire, oculaire, urogénitale

réservé


localisée

++

hypoplasie émail

bon

Non-Herlitz

avec atrésie pylorique

++++

hypoplasie émail

mauvais


inverse

+++

dans les plis

hypoplasie émail

bon


à début tardif

++

hypoplasie émail

bon


syndrome LOC (Shabbir)

++ et érosions

face, larynx, dents

mauvais



transmission

nom

ancien nom

bulles

atteintes extracutanées

pronostic

vital


généralisée

Pasini

Cockayne-Touraine

+++

atteinte digestive



prétibiale


++++

tibias, pieds, mains

-

bon


prurigineuse


++++

-

bon

dominante

limitée aux ongles


0, dystrophie des ongles

-

bon


limitée aux extrémités


++++ 

pieds, mains

-

bon


dermolyse bulleuse du nouveau-né


+++

-

bon


généralisée sévère

Hallopeau-Siemens

++++

atteintes digestive et oculaire,

pseudosyndactylies

mauvais

+ spinocellulaires


généralisée

non Hallopeau-Siemens

++++

atteintes digestive et oculaire,

pseudosyndactylies

réservé

+ spinocellulaires

récessive

inverse


+++

plis, le long de colonne vertébrale

anémie, 

retard de croissance, atteintes digestive et urogénitale



prétibiale


++++

tibias, pieds, mains

-

bon


limitée aux extrémités


++++

 pieds, mains

-

bon


prurigineuse


++++

-

bon


centripète


+++

tibias, pieds, mains

-



dermolyse bulleuse du nouveau-né


+++

-

bon




Implications anesthésiques

Echocardiographie pour diagnostiquer une éventuelle cardiomyopathie dilatée (par déficit alimentaire en sélénium et/ou carnitine, anémie chronique, surcharge en Fe) ; les  formes dystrophiques et les formes simples dues à une mutation du gène KHLH24 présentent un risque majoré

Risque d’intubation difficile : microstomie, trismus, ankyloglossie. Caries dentaires fréquentes. Risque de lésions laryngées à tous les niveaux de la glotte. Risque de sténose oesophagienne.


Dans toutes les formes, il y a une fragilité extrême de la peau et des muqueuses (sauf la muqueuse nasale) : éviter tout frottement ou cisaillement car cela entraîne la formation de bulles. Désinfection par tamponnement. Pas d'adhésif, pas d'électrodes ECG sauf si la peau est protégée par Mepiform®, Mepilex® ou Mepitel®. L’interposition d’une plaque en gel hydrophile (destinée à garantir une bonne conduction cutanée lors de la défibrillation : 3M® Defib pads 2346N) entre les électrodes ECG ou la plaque de bistouri a été utilisée avec succès. Abord veineux difficile. Pas de plaque de bistouri (préférer coagulation bipolaire). En général, il y a un usage chronique de pommades cortisonées : risque d'insuffisance surrénalienne, ostéoporose. Si possible : induction iv ; si inhalatoire, prémédication orale pour éviter l’agitation; recouvrir le masque facial de compresses vaselinées ou imbibées de KY; lubrification soigneuse des lames de laryngoscope, gants, masque laryngé etc. En cas de bulles : les percer avec une aiguille stérile. Eviter les infiltrations d’anesthésique local  (pour des soins dentaires p ex) dont l’effet mécanique est similaire à un cisaillement mais différents blocs (axillaire, épidural, rachianesthésie) ont été utilisés avec succès. Utiliser des pansements non-adhésifs type Aquacel® , Mepiform® ou Mepitel®. Eviter sparadrap, suppositoires, sucettes. On peut utiliser le spray à base de silicone TrioNiltac® pour ôter les pansements.


Pour les formes jonctionnelles, latteinte respiratoire (25% des cas) est en général liée aux formes sévères et associée à un reflux gastro-oesophagien. Le type Herlitz présente le plus grand risque de complications : le risque de sténose laryngée est de 40% à lâge de 6 ans : voix affaiblie et rauque, stridor, puis détresse respiratoire. Elle peut être traitée par voie endoscopique mais il nest pas rare quon doive recourir à une trachéotomie.


Formes dystrophiques: intubation difficile (ouverture de la bouche limitée par des cicatrices rétractiles); il semble préférable dutiliser la voie nasale pour intuber (sonde ramollie avec de leau chaude et bien lubrifiée) car lépithélium endonasal est de type respiratoire et plus résistant aux forces de cisaillement. Un traitement expérimental à base dun gel de Beremagene Geperpavec (thérapie génique qui utilise lherpès virus type 1 comme vecteur) donne des résultats prometteurs dans ces formes. 

La surface de peau atteinte et les besoins métaboliques que nécessite la cicatrisation peuvent entraîner une perte de liquides, une hypoprotéinémie et une malnutrition, avec des conséquences pharmacologiques.

La voie intranasale a été utilisée avec succès pour obtenir une analgésie rapide.

L’importance de la douleur et du prurit est très variable. Le prurit est souvent rebelle et résistant : essayer anti histaminiques, antidépresseurs tricycliques, prégabaline, ondansétron, méthylnaltrexone, gel de lidocaïne.

En cas dépidermolyse bulleuse simple, lutilisation quotidienne, durant 15 -20 minutes pour des pansements,  du mélange équimolaire doxygène et de protoxyde dazote sest révélée efficace pendant plusieurs mois et sans produire deffets néfastes à condition dassurer un supplément vitaminiques et une surveillance régulière des taux sanguins dacide folique et de vitamine. B12.

Website: www.debra-international.org.uk



Références : 


Mise-à-jour avril 2023