Epanchement péricardique

Chez ladulte, la cavité péricardique contient normalement moins de 20 à 25 ml de liquide. La tolérance hémodynamique dun épanchement péricardique dépend de son volume (et de la pression exercée sur les cavités cardiaques, surtout droites) et de sa rapidité dinstallation : laugmentation de la pression dans le péricarde entraîne une compression des cavités cardiaques et une diminution de leur compliance diastolique, cest-à-dire une diminution de leur remplissage et une diminution du débit cardiaque qui est compensée par une tachycardie et une vasoconstriction périphérique. Légalisation des pressions intrapéricardique et intracardiaques entraîne une interruption quasi complète du remplissage cardiaque.

La ventilation spontanée influence le remplissage des cavités cardiaques : augmentation du retour veineux et du volume du VD en inspiration avec léger déplacement du septum vers le VG, et inversement en expiration. En cas dépanchement péricardique, ces variations de volume ne sont plus amorties par le péricarde et en inspiration le déplacement du septum avec diminution du remplissage du VG est exagéré, ce qui provoque le pouls paradoxal  (diminution du pouls et chute de PA de plus de 10 mmHg en fin dinspiration, également visible sur le pléthysmogramme du saturomètre).

Auscultation : bruits cardiaques inaudibles. A lECG : tachycardie, microvoltage et alternance électrique. Lapparition dune dyspnée est un signe de mauvaise tolérance.


Causes possibles dun épanchement péricardique


-        traumatique: post- chirurgie cardiaque, perforation par cathéter veineux
                       central ou lors dun cathétérisme, polytraumatisme avec lésions thoraciques

-        infection bactérienne: Haemophilus influenzae, pneumocoque, méningocoque

-        tuberculose

-        affection virale: Coxsackies, Adénovirus, Echovirus

-        parasitose: toxoplasmose

-        collagénose: lupus érythémateux disséminé, maladie de Still, sclérodermie

-        rhumatisme articulaire aigu

-        syndrome post-cardiotomie

-        néoplasme: tératome intrapéricardique, mésothéliome péricardique, métastases, tumeur de voisinage (masse médiastinale)

-        insuffisance rénale chronique

-        emphysème interstitiel (épanchement aérique)

-        post-radiothérapie

-        myxoedème

-        chylopéricarde

-        cardiopathie avec obstacle (p. ex. coarctation aortique en période néonatale)

-        dénutrition

-        péricardite à cristaux de cholestérol


En cas de péricardite virale, il faut se méfier dune myocardite associée.

La péricardite à cristaux de cholestérol [MIM 260 900] est rare, de transmission autosomique récessive et en général peu symptomatique. Elle évolue souvent vers une péricardite constrictive avec des calcifications.


Tamponnade:

Les signes cliniques classiques dune tamponnade sont : lhypotension artérielle, une pression veineuse élevée (jugulaires saillantes), des bruits cardiaques assourdis (triade de Beck) et un pouls paradoxal.

Chez le nouveau-né ou le nourrisson tachycarde ces signes sont cependant souvent absents et le pouls paradoxal est difficile à mettre en évidence. De plus, le pouls paradoxal nest pas observé en cas de shunt intracardiaque. A lECG : microvoltage et alternance électrique. Le diagnostic est posé à léchographie cardiaque : collapsus de lOD et du VD en diastole, pas de collapsus inspiratoire de la VCI.


Il faut penser à cette pathologie en cas de détérioration hémodynamique brutale et inexpliquée chez un petit enfant qui présente une des situations à risque précitées. En réalité, le liquide saccumule peu à peu dans la cavité péricardique et la décompensation hémodynamique survient au moment où la pression intra-péricardique égale la pression veineuse, ce qui gêne le remplissage cardiaque.


Traitement:

-        en cas dextrême urgence, on peut rapidement décomprimer les cavités cardiaques en ponctionnant le péricarde sous échoguidage : on introduit une aiguille montée sur une seringue juste à côté de lapophyse xyphoïde (du côté gauche) en avançant, le vide à la main, tout en visant lépaule gauche. Le sang dorigine péricardique est incoagulable, contrairement à celui qui proviendrait de la ponction intracardiaque.

-        dans les cas moins urgents, il est préférable de réaliser la ponction-drainage sous anesthésie.


Dans une série rétrospective de 65 enfants qui ont subi 79 anesthésies pour drainage dun épanchement péricardique  (53 péricardiocentèses et 12 péricardiostomies),  8 complications majeures ont été observées, dont 2 arrêts cardiaques et 4 hypotensions majeures à linduction. Les facteurs prédictifs dune complication majeure étaient, dans cette série, une tachypnée et la présence de signes échographiques de tamponnade en préopératoire.



Implications anesthésiques

  1. en cas de péricardite : risque de myocardite associée ; interactions avec le traitement médical : AINS, aspirine, colchicine ou corticotéroïdes
  2. en cas de tamponnade, il faut maintenir une PVC élevée, conserver la respiration spontanée de manière à favoriser le remplissage ventriculaire, et maintenir une légère tachycardie (toute bradycardie est mal supportée). Lenfant nest endormi que quand le chirurgien est prêt à inciser : on utilise de petites doses de kétamine et/ou détomidate, et, si nécessaire, une ventilation assistée douce jusquau moment du drainage péricardique. Une augmentation de la PAs est observée dès que lépanchement péricardique est drainé.


Références : 

-        Musumeci R, Hickey P.
Anesthesia in a neonate with tamponade due to massive pericardial effusion.
Anesth Analg 1994; 78:169-71.

-        Rawlinson E, Bagshaw O.
Anesthesia for children with pericardial effusion: a case series.
Pediatr Anesth 2012; 22: 1124-31.

-        Grocott HP, Gulati H, Srinathan S, Mackensen GB.
Anesthesia and the patient with pericardial disease.
Can J Anesth 2011; 58: 952-66.


Mise-à-jour décembre 2019