Groupe de myopathies (Limb Girdle Muscular Dystrophies ou LGMD en anglais) qui se caractérisent par une atteinte clinique principalement limitée aux ceintures scapulaire et pelvienne. On distingue deux grandes catégories cliniques classées selon leur mode de transmission et selon la protéine musculaire déficiente, qui peut-être une protéine du sarcolemme ou de l’appareil contractile (calpaine3, téléthonine, titine, desmine). Une atteinte cardiaque est possible qui n’est pas toujours corrélée à l’importance de la pathologie musculaire.
Formes à transmission dominante ou LGMDD (10 % des cas)
On distingue quatre types :
a) LGMDD1 (ancien : LGMD1E) [MIM 603 511] : mutation du gène DNAJB6 (7q36.3)
b) LGMDD2 (ancien : LGMD1F) [MIM 608 423] : mutation du gène TNPO3 (7q32) qui code la transportine
c) LGMDD3 (ancien : LGMD1G) [MIM 609 115] : mutation du gène HNRNPDL (4q21.22)
d) LGMDD4 [MIM 603 511] : mutation du gène CAPN3 (15q15.1) qui code la calpaïne
e) LGMDD5 [MIM 158 810] : mutation du gène COL6A1 (21q22.3) qui code la sous-unité á1 du collagène 6, ou COL6A2 (21q22.3) qui code la sous-unité á2 du collagène 6 ou COL6A3 (2q37.3) qui code la sous-unité á3 du collagène 6. D’autres mutations de ces gènes produisent les myopathies de Bethlem et d’Ullrich (voir ces termes)
f) Myopathie myofibrillaire type 3 (ancien LGMD1A) [MIM 159 000]: déficit en myotiline (gène MYOT en 5q31); le début s’exprime à l’âge adulte par une dysarthrie ; il existe une atteinte cardiaque dans 50% et les CPK normales ou peu élevées ; une autre mutation de ce gène entraîne la myotilinopathie distale (voir myopathies myofibrillaires)
g) Myopathie d’Emery-Dreifuss type 2 (ancien LGMD1B) [MIM 159 001 et 181 350] : déficit en lamine A/C (gène LMNA en 1q22) : le début survient entre 5 et 20 ans et peut ne se révéler que par des problèmes cardiaques (bloc A-V, arythmies auriculaires, mort subite) : indication fréquente de pose d’un défibrillateur interne; les CPK sont normales ou peu élevées
h) Rippling muscle disease (ancien LGMD1C [MIM 607 780 et 606 072](voir ce terme): déficit en cavéoline 3 (gène CAV3 en 3p25.3); le début clinique survient à tout âge ; l’affection se traduit par des crampes à l’exercice, des contractions en vague des muscles à la percussion, une amyotrophie des ceintures ou une faiblesse des muscles distaux ; les CPK sont modérément élevées. D’autres mutations de ce gène produisent l’hyperCKémie idiopathique, la cardiomyopathie hypertrophique familiale type 1, la myopathie distale type Tateyama et le syndrome du QT long congénital type 9.
i) Myopathie fibrillaire type 1 (ancien LGMD1D lié à DES) [MIM 601 419] : mutation du gène DES (2q35) qui code la desmine ; d’autres mutations de ce gène produisent une myopathie des ceintures de transmission autosomique récessive, la cardiomyopathie dilatée type 11 et la cardiomyopathie arythmogène du ventricule droit (voir ces termes)
j) LGMD1H [MIM 613 530] : mutation d’un gène non encore identifié en 3p25.1-p23 très rare ; les CPK sont normales ou peu élevées.
Formes à transmission récessive ou LGMDR (90 % des cas)
On décrit de nombreux sous-types :
- LGMDR1 (ancien LGMD2A) (25%)[MIM 253 600], ou myopathie d’Erb ou déficit en calpaïne 3 (gène CAPN3 en 15q15.1) qui joue un rôle dans le mécanisme de régénération musculaire; c’est la forme la plus commune ; elle débute entre 8 et 15 ans et se caractérise par la présence de contractures avec parfois un phénotype de type Emery-Dreifuss ; sa progression est lente ; il existe parfois une cardiomyopathie ; les CPK sont élevées ; la prévalence en est plus élevée dans certaines communautés Amish, à La Réunion, au Brésil et dans le pays basque
- LGMDR2 (ancien LGMD2B (20%) [MIM 253 601] ou déficit en dysferline (atteinte des ceintures) : mutation du gène DYSF en 2p13.2; elle débute vers 20 ans, se traduit par des douleurs musculaires ; il peut exister une cardiomyopathie (rarement) ; les CPK sont très élevées ; d’autres mutations de ce gène peuvent entraîner la myopathie de Miyoshi [MIM 613 318, 254 130](voir ce terme)
- LGMDR3 (ancien LGMD2D) [MIM 608 099] due à un déficit en α-sarcoglycan ou sarcoglycanopathie ou adhalinopathie (gène SGCA en 17q12-q21.33), plus fréquente au Brésil et en Europe.
- LGMDR4 (ancien LGMD2E) [MIM 600 900]: due à un déficit en â-sarcoglycan (gène SCGB en 4q12).
- LGMDR5 (ancien LGMD2C) [MIM 253 700]: due à un déficit en ã-sarcoglycan (gène SGCG en 13q12.12) ; plus fréquente en Afrique du Nord
- LGMDR6 (ancien LGMD2F) [MIM 601 287]: due à un déficit en ä-sarcoglycan (gène SGCD en 5q33.3-q34)
Le tableau clinique des formes LGMDR3 à 6, aussi appelées Sarcoglycanopathies, est variable, souvent proche de la maladie de Duchenne avec un début entre 6 et 8 ans, une hypertrophie des mollets et de la langue, une progression rapide avec atteinte cardiaque (30%)(dilatation ventriculaire, cardiomyopathie), mais l’évolution peut être plus lente; des cas de rhabdomyolyse (myoglobinurie = émission d’urines coca-cola) après une exercice ou un épisode fébrile ont été décrits ; la transmission est autosomique récessive : la maladie est donc aussi fréquente chez les filles que chez les garçons ; les CPK sont élevées ;
- LGMDR7 (ancien LGMD2G) [MIM 601 954]: déficit en téléthonine (gène TCAP en 17q12), seulement décrite au Brésil ; elle débute entre 2 et 15 ans ; elle se traduit par une hypertrophie des mollets et une atteinte cardiaque dans 50% des cas ; les CPK sont élevées ;
- LGMDR8 (ancien LGMD2H) [MIM 254 110] : déficit en protéine TRIM32 (9q31.1); elle débute entre 8 et 25 ans ; sa progression est lente ; elle est seulement décrite chez les Huttérites au Canada ; les CPK sont élevées ; d’autres mutations de ce gène peuvent provoquer une myopathie sarcotubulaire
- LGDMR9 (ancien LGMD2I) [MIM 607 155] : déficit en fukutin-related protein (gène FKRP en 19q13.32); observée surtout dans le Nord de l’Europe, elle débute entre 10 et 20 ans ; elle se traduit par des contractures, des troubles de conduction ventriculaire et une cardiomyopathie dilatée dans 50% des cas ; en cas de début dans la petite enfance, il y a une hypertrophie de la langue ; les CPK sont élevées ; d’autres mutations de ce gène peuvent provoquer une dystrophie congénitale avec déficit en laminine α-2
- LGMDR10 (ancien LGMD2J) [MIM 608 807]: déficit en titine (gène TTN en 2q31.2) ; seulement décrite en Finlande, elle débute entre 10 et 30 ans ; sa progression est lente, sans atteinte cardiaque ; les CPK sont élevées ; voir aussi titinopathies
- LGMDR11 (ancien LGMD2K) [MIM 609 308]: déficit en POMT1 (9q34.13); elle débute dans l’enfance ; sa progression est lente avec contractures ; d’autres mutations de ce gène peuvent provoquer une dystrophie congénitale sévère de type Walker-Warburg
- LGDMR12 (ancien LGMD2L) [MIM 611 307]: déficit en anoctamine 5 (gène ANO5 en 11p14.3) ; elle débute à un âge variable ; l’atteinte est parfois asymétrique ; les CPK sont élevées ; d’autres mutations de ce gène peuvent entraîner une myopathie de Miyoshi
- LGMDR13 (ancien LGMD2M) [MIM 611 588]: déficit en fukutine (9q31.2) : elle débute dans la petite enfance (hypotonie qui s’aggrave en cas de pathologie virale) ; sa progression est lente avec atteinte cardiorespiratoire possible : l’IRM cérébrale est normale ; les CPK sont élevées ; d’autres mutations de ce gène peuvent provoquer une dystrophie congénitale sévère de type Fukuyama ;
- LGMDR14 (ancien LGMD2N) [MIM 613 158]: déficit en POMT2 (gène POMT2 en 14q24.3) ; l’atteinte clinique est de gravité variable ; les CPK sont élevées.
- LGMDR15 (ancien LGMD2O) [MIM 613 157] : déficit en protein-O-linked mannose-acétylglucosamininyltransférase 1 (gène POMGNT1 en 1 p34.1).
- LGMDR16 (ancien LGMD2P) [MIM 613 818] : déficit en glycoprotéine1 associée à la dystrophine suite à une mutation du gène DAG1 en 3p21.31
- LGMDR17 (ancien LGMD2Q) [MIM 613 723] : déficit en plectine 1, une protéine associée au sarcolemme au niveau des disques Z, suite à une mutation du gène PLEC1 en 8q24. D’autres mutations de ce gène peuvent entraîner une épidermolyse bulleuse associée à la dystrophie musculaire, un syndrome myasthénique ou une ophtalmoplégie
- LGMDR18 (ancien LGMD2S) [MIM 615 356] : mutation du gène TRAPPC11 (4q35.1)
- LGMDR19 (ancien LGMD2T) [MIM 615 352] : mutation du gène GMPPB (3p21.31 qui code la GDP-mannose pyrophosphorylase B
- LGMDR20 (ancien LGMD2U) [MIM 616 052] : mutation du gène ISPD (7p21.2-p21.1)
- LGMDR21 (ancien LGMD2Z) [MIM 617 232] : mutation du gène POGLUT1 (3q13.33)
- LGMDR22 (ancien : myopathie de Bethlem type 1) [MIM 254 090] : mutation du gène COL6A1 (21q22.3) qui code la sous-unité á1 du collagène 6, ou COL6A2 (21q22.3) qui code la sous-unité á2 du collagène 6 ou COL6A3 (2q37.3) qui code la sous-unité á3 du collagène 6. D’autres mutations de ces gènes produisent la LGMDD5, les myopathies de Bethlem et d’Ullrich (voir ces termes)
- LGMDR23 [MIM 618 138] : mutation du gène LAMA2 (6q22.33) qui code la laminine alpha 2 de la mérosine ; d’autres mutations de ce gène produisent une dystrophie musculaire congénitale
- LGMDR24 [MIM 618 135] : mutation du gène POMGNT2 (3p22.1)
- LGMDR25 (ancien LGMD2X [MIM 616 812] : mutation du gène POPDC1 ou BVES (6q21) qui entraîne surtout des troubles du rythme cardiaque et une atteinte musculaire très discrète
- LGMDR26 [MIM 605 824] : mutation du gène POPDC3 (6q21): début à l’âge adulte avec une faiblesse proximale au niveau des membres inférieurs ; hypertrophie des mollets ; CPK élevées
- Myopathie myofibrillaire type 1 (ancien LGMD2R) [MIM 601 419 et 615 325] : mutation du gène DES (2q35) qui code la desmine
- Maladie de Pompe (ancien LGMD2V) [MIM 232 300]: mutation du gène GAA (17q25.3) qui code l’alpha glucosidase acide ; voir formes juvénile et tardive de la maladie de Pompe (glycogénose)
- Dystrophie musculaire associée à PINCH2 (ancien LGMD2W) [MIM 616 827] : mutation du gène LIMS2 ou PINCH2 (2q14.3)
- Dystrophie musculaire associée à TOR1AIP1 (ancien LGMD2Y) [MIM 617 072] : mutation du gène TOR1AIP1 (1q25.2) qui code une protéine associée à la laminine
- Dystrophie musculaire avec trouble de la glycosylation type Io [MIM 612 937] : mutation du gène DPM3 (1q22).
- Dystrophie musculaire scapulopéronière avec tête tombante: mutation du gène VCP (9p13.3)
- Dystrophie des ceintures avec ophtalmoplégie : mutation du gène PLEC (8q24.3) qui code la plectine
- Dystrophie des ceintures associée à PYROXD1 : mutation du gène PYROXD1 (12p12.1)
- Dystrophie des ceintures associée à KBTBD13 : mutation du gène KBTBD13 (15q22.31)
Implications anesthésiques:
ECG et échocardiographie préopératoires ; par analogie avec les dystrophinopathies, il est prudent d’éviter les halogénés surtout si les CPK sont élevées (risque de rhabdomyolyse).
Références :
- Gurnaney H, Brown A, Litman RS.
Malignant hyperthermia and muscular dystrophies.
Anesth Analg 2009; 19:1043-8.
- Moro C, Dangelser G, Veyckemans F.
Prise en charge anesthésique d’un enfant atteint de delta-sarcoglycanopathie.
Ann Fr Anesth Réanim 2007 ;26:359-62.
- Hermans MCE, Pinto YM, Merkies ISJ, de Die-Smulders CEM, Crijns JHGM, Faber CG.
hereditary muscular dystrophies and the heart.
Neuromuscul Disord 2010; 20: 479-92. (lien vers PDF)
- Straub V, Bushby K.
The childhood limb-girdle muscular dystrophies.
Sem Pediatr Neurol 2006; 13: 104-14.
- Mercuri E, Muntoni F.
Muscular dystrophies.
Lancet 2013 ; 381 :845-60.
- Chuang MC, Duggan LV, van Heest RD, MacLeod W.
Laparoscopic cholecystectomy under spinal anesthesia in a patient with limb-girdle muscular dystrophy.
Can J Anesth 2013 ; 60 : 1276-7.
- Ceravolo F, Messina S, Roolico C, Strisciuglio P, Concolino D.
Myoglobinuria as first clinical sign of a primary alpha-sarcoglycanopathy.
Eur J Pediatr 2014; 173: 239-42.
- Allen T, Maguire S.
Anaesthetic management of a woman with autosomal recessive limb-girdle muscular dystrophy for emergency caesarean section.
Int J Obstetr Anesth 2007; 16: 370-4.
- Kabade SD, Bhosale R, Karthik S.
Case of limb-girdle muscular dystrophy for total thyroidectomy: anaesthetic management.
Indian J Anaesth 2016; 60:358-60.
- Cao XQ, Joypaul K, Cao F, Gui LL, Hu JT, Mei W.
Anesthetic management of a patient with limb-girdle muscular dystrophy 2B : care-compliant case report and literature review.
BMC Anesthesiology 2019 ; 19 : 155
- Benarroch L, Bonne G, Rivier F, Hamroun D.
The 2020 version of the gene table of neuromuscular disorders.
Neuromusc Dis 2019 ; 29 : 980-1018 ou http://www.musclegenetable.fr.
Mise-à-jour juin 2021