Désordres du développement sexuel

(Ambiguité sexuelle)

Les termes hermaphrodisme et intersexe ne sont plus employés.


Rappel embryologique :

L'embryon humain a la double potentialité de développer ses voies génitales dans le sens masculin ou féminin. La présence du gène SRY sur le bras court du chromosome Y oriente la différentiation de la gonade dans le sens d'un testicule qui va sécréter 2 hormones :

En l'absence de gène SRY (voir syndrome de Swyer), la gonade se différencie dans le sens d'un ovaire et les canaux de Müller persistent ; ils vont former les trompes à leur extrémité crâniale et, par fusion de leur extrémité caudale, lutérus et la partie haute du vagin.


Démarche diagnostique en période néonatale :

L'ambiguïté sexuelle résulte d'une anomalie de la différentiation des organes génitaux externes ou d'une discordance entre organes génitaux externes et internes.  Il est rare (mais possible) de nos jours encore que le diagnostic ne soit évoqué qu'au moment de la puberté voire à l'âge adulte devant une puberté hétérosexuelle ou une aménorrhée primaire ( testicule féminisant).

Habituellement, l'ambiguïté est reconnue en période néonatale. Le diagnostic est évident à la naissance dans formes majeures, mais il peut être difficile dans les formes d'apparence fruste : micropénis avec verge coudée (correspondant en fait à un clitoris) hypertrophie clitoridienne, cryptorchidie avec hyperpigmentation scrotale, grande lèvre contenant une masse gonadique, etc. Au moindre doute, il est urgent de rechercher les signes d'un syndrome de perte de sel, témoin d'une hyperplasie congénitale des glandes surrénales (voir ce terme), cause la plus fréquente d'ambiguïté sexuelle et qui requiert un traitement par corticothérapie en urgence.

Si les dosages de 17-OH progestérone sont normaux, l'enquête étiologique s'oriente vers la recherche de facteurs médicamenteux durant la grossesse et celle de cas familiaux d'ambiguïté ou de stérilité féminine. Une série d'examens complémentaires et d'explorations en imagerie médicale sont pratiqués de manière à identifier la nature de l'anomalie, sa gravité et la stratégie thérapeutique que l'on peut proposer.

Le bilan d'exploration permet de classer les désordres du développement sexuel en 3 groupes d'importance inégale :

De plus, des anomalies chromosomiques peuvent être la cause dun désordre du développement sexuel : 45X/XY dysgénésie gonadique mixte), 46XX/46XY (chimérisme) et 47 XXY (syndrome de Klinefelter).


Type d'ambiguïté

Désordre du développement sexuel  46 XX (60 %)

Désordre du développement sexuel 46 XY (35 %)

Caryotype

46 XX

46 XY

Gonades

2 ovaires

2 testicules

Organes génitaux internes

Féminins jusqu'au tiers supérieur du vagin

Aspect variable

Organes génitaux externes

  • Masculinisation ± avancée évaluée par la classification de Prader
  • Absence de gonade dans les bourrelets génitaux

Aspect variable

Cause

Hyperandrogénie hormonale

Multiples causes possibles

Étiologie

  • Hyperplasie congénitale des surrénales (90%)
  • Tumeur sécrétante ou traitement hormonal maternels
  • Dysgénésie gonadique 46XY partielle ou complète (syndrome de Swyer)

(voir ces termes)

  • Involution testiculaire (syndrome du "testicule évaporé")
  • Insensibilité des récepteurs aux androgènes ("testicule féminisant")
  • Déficit en 5á-réductase type 2
  • syndrome polymalformatif (DRASH, WAGR)
  • déficit en gonadotrophine ou en hormone antimüllérienne (rare)
  • idiopathique (30 %)

                                  Tableau : Classification des désordres du développement sexuel


L'importance de la virilisation des organes génitaux féminins est évaluée par la classification de Prader (Tableau). Le choix du sexe définitif dépend de facteurs anatomiques, des possibilités de reconstruction et de la cause de l'ambiguïté. C'est une décision collégiale qui doit associer les parents dans la décision finale. La décision doit être prise rapidement et de manière définitive : il faut éviter absolument d'avoir à modifier secondairement le sexe choisi.

Type

Description

1

Vulve normale avec hypertrophie clitoridienne

2

  • Vestibule large, en forme d'entonnoir ouvert à la base du clitoris (sinus urogénital avec 1 orifice urétral et 1 orifice vaginal distincts)
  • Grandes lèvres individualisées, parfois partiellement soudées.

3

  • Volumineux clitoris
  • Sinus urogénital étroit s'ouvrant par un orifice unique (commun à l'urètre et au vagin) à la base du clitoris
  • Fusion partielle des grandes lèvres.

4

  • Morphologie masculine avec pénis hypoplasique et, souvent, coudé
  • Périnée hypoplasique avec orifice unique s'ouvrant à la face ventrale du pseudo-pénis (aspect d'hypospadias) correspondant à l'ouverture d'un sinus urogénital dans lequel s'abouche un vagin atrétique
  • Fusion complète des grandes lèvres

4 bis

Absence d'abouchement vaginal dans le sinus urogénital (la génitographie n'opacifie pas le vagin)

5

  • Différentiation masculine complète avec aspect de cryptorchidie
  • Abouchement du vagin très haut-situé dans l'urètre

5 bis

Absence d'abouchement vaginal dans l'urètre.

                                 Classification des ambiguïtés sexuelles féminines selon Prader



Traitement :

Sur le plan chirurgical, il est plus facile de féminiser (création d'un vagin et réduction de taille d'un organe clitorido-pénien) que de masculiniser (il faut un pénis d'au moins 20-25 mm de longueur à la naissance et des corps caverneux stimulables par les androgènes). En général, les pseudohermaphrodismes féminins et les hermaphrodismes vrais sont "féminisés" chirurgicalement et élevés en filles. Les pseudohermaphrodismes masculins posent davantage de difficultés dans le choix du sexe final et le test aux androgènes est un élément déterminant : l'insensibilité totale ou partielle aux androgènes, quelle qu'en soit la cause, fait opter pour le sexe féminin ; les déficits en 5á-réductase (voir ce terme) sont plutôt maintenus dans le sexe masculin avec opothérapie substitutive par dihydroandrostérone.

Les gestes de chirurgie plastique des organes génitaux doivent être précoces et réalisés, si possible, en un seul temps et en sappuyant sur des considérations éthiques multidisciplinaires.


Implications anesthésiques:

en cas de génitoplastie : indication dassocier un bloc péridural lombaire à lanesthésie générale ; interventions multiples ; en cas dhyperplasie congénitale des surrénales, adapter lopothérapie substitutive (voir dhyperplasie congénitale des surrénales)


Références : 

-        Lambert SM, Vilain EJ, Kolon TF.
A practical approach to ambiguous genitalia in the newborn period.
Urol Clin North Am 2010; 37:195-205.

-        Ahmed SF, Rodie M.
Investigation and initial management of ambiguous genitalia.
Best Pract Res Clin Endocrinol Metab 2010; 24:197-218.

-        Vidal I, Gorduza DB, Haraux E, Gay CL, Chatelain P, Nicolino M, Mure PY, Mouriquand P.
Surgical options in disorders of sex development (dsd) with ambiguous genitalia.
Best Pract Res Clin Endocrinol Metab 2010; 24:311-24.


Mise à jour: décembre 2021