Promotion des médecins de juin 1998

Discours du Professeur R. Krémer, Président de l'AMA-UCL

 

Chers amis, confrères et consoeurs,

Après le moment solennel que vous venez de vivre, j'imagine que vous clamez un alleluia et poussez un ouf ! Après sept ans - minimum - de labeur et de soucis, vous voilà porteur du titre un peu archaïque de docteur en médecine, chirurgie et accouchements.  Les anciens vous félicitent et vous accueillent. Vous allez quitter le giron de l'Alma Mater, déployer vos ailes, et vous élancer dans un ciel tantôt serein, tantôt couvert, où les prédateurs ne sont pas rares.

Du jour au lendemain, les appels téléphoniques ne seront plus uniquement ceux des copains et copines; pour vos malades vos paroles seront d'évangile; votre signature aura un pouvoir considérable; votre voiture sera agrémentée d'une croix rouge ou d'un caducée; vous gagnerez votre vie et celle de votre famille, mais vous serez soumis à l'impôt et devrez songer à épargner; vous serez peut-être syndiqués; vos boîtes aux lettres vont regorger de journaux médicaux et de publicités, des délégués médicaux vont vous courtiser et des courtiers vous harceler.

Mais tout ceci est anecdotique et caricatural. Le plus important est que vous allez partager les souffrances et les angoisses de vos patients : votre métier va vous amener à plonger dans l'humain, au quotidien; vous aurez des joies, des doutes, des regrets, vous partagerez de lourds secrets, certains malades seront reconnaissants, d'autres ingrats ou revendicateurs. Mais l'expérience que vous allez acquérir au fil des années est incomparable : votre métier est l'un des rares qui amène à recueillir les confidences des humbles et des riches, à soigner les SDF et les PDG, à démêler les discours des névrosés et les plaintes des vrais malades.

Malgré ce travail absorbant et une disponibilité nécessaire, votre qualité de vie et celle de votre famille doit être préservée.  L'organisation actuelle de la médecine le permet, surtout grâce au travail d'équipe tel qu'il est organisé par exemple dans nos hôpitaux pour les spécialistes et pour les généralistes dans les maisons médicales, grâce aussi aux techniques de communication : les téléphones portables, les fax, les données informatisées facilement accessibles...

N'oubliez pas que le contact personnel reste essentiel, prenez le temps d'écouter et de converser : les moyens techniques sont des serviteurs et non des maîtres.

Permettez-moi deux remarques importantes. Je les fais chaque année, mais la répétition n'est pas vaine puisque le public se renouvelle.

La première remarque concerne la sécurité sociale qui, généreuse, permet aux plus déshérités de bénéficier des soins de santé. Les coûts progressent de manière vertigineuse du fait des techniques de plus en plus sophistiquées, des appareillages de plus en plus chers et du vieillissement de la population. Les médecins doivent être économes des deniers de l'état (l'état ce n'est plus "moi", mais c'est "nous" !), éviter de répéter les examens sans raison impérieuse, et de prescrire des médicaments à la légère; éduquons nos patients à ne pas appeler le docteur pour des vétilles et à ne pas réclamer une ordonnance à chaque visite, et un scanner à chaque migraine.  Il y va de la survie de nos soins de santé.

Le dernier point que je voudrais aborder est celui de l'enseignement continu ou continué, une obligation morale, mais aussi légale. Les longues années passées à l'Université vous ont apporté un instantané de l'état de la science médicale, qui est par ailleurs en constante et rapide évolution : aujourd'hui mieux qu'hier, et moins bien que demain. Il y a, de nos jours, mille façons de se mettre au courant : conférences, séminaires, GLEM, revues, journaux, congrès, CD-Rom.  A vous de choisir et de vous organiser !
Néanmoins, la forme d'enseignement la plus logique et la plus efficace, c'est le contact avec votre Université, qui organise un enseignement continu structuré et de qualité et publie des syllabus et la revue Louvain Médical.   La boutade "Vivent les vacances, les cahiers au feu et les maîtres au milieu" mérite donc d'être nuancée.

Les Anciens vous félicitent, ainsi que vos familles : ils sont prêts à vous aider et à vous informer dans la mesure des moyens que vous leur donnerez en vous affiliant à notre association. Nous prendrons prochainement contact avec vous.  Pour les promus étrangers en particulier, nous avons une pensée pour ceux qui vont rentrer dans leur patrie et y rencontreront parfois des conditions de travail difficiles.  Qu’ils restent en contact avec nous : nous sommes prêts à les écouter et à les aider !

René Krémer
Président de l'AMA-UCL