Discours prononcé par Rodolphe Sagehomme, président de l'Assemblée générale des étudiants de Louvain Au nom de lintérêt général des étudiants Chers étudiants, chers amis, chers louvanistes, Mesdames, Messieurs, Mesdames et Messieurs les Professeurs, Monsieur le Président, Monsieur le Recteur, Messeigneurs, La rentrée donne loccasion à la communauté universitaire déchanger ses vux, dastiquer ses trompettes et de compter ses membres. En nous voyant tous aujourdhui, il semble que nous constituons, professeurs, étudiants, membres du personnel, une grande famille qui travaille au progrès du savoir et de la société. La situation du site de Louvain-la-Neuve, son histoire encore récente, renforcent aussi lidée dun projet vécu en commun, porté ensemble. Et si cette impression de début dannée nétait quune apparence ? Aujourdhui, luniversité désire se gérer comme une entreprise moderne : cest en tout cas le souhait de ses autorités et de son conseil dadministration. Linstitution doit faire face à un environnement concurrentiel, auquel elle emprunte ses pratiques en croyant y faire face. Le sentiment de communauté risque alors de ressortir du domaine des images tandis que les débats essentiels, parce quils exigeraient des visions claires ou une conception supérieure du bien commun, sont captés directement ou indirectement par des cercles dinfluence restreints. Cest parce que lopinion du corps étudiant ne dépasse pas leffet cosmétique quun décret est en cours de discussion. Décret qui permettra de garantir leur représentation effective au sein des universités de la Communauté française, en ce compris leurs organes de direction. Ce décret est nécessaire parce quil répond à un refus de longue date ; mais aussi parce quil permet aux corps étudiant et à lensemble des corps de luniversité, de briser lidée selon laquelle ladministration de linstitution universitaire doit être gérée en bureau restreint, entre quelques élites universitaires dont certaines nont plus vu détudiant de près depuis longtemps. Plus de participation des corps à luniversité, ce nest donc pas plus de désordre, dincompétence, de gêne à une gestion efficace. Cest simplement reconnaître la communauté universitaire dans sa diversité et son importance. Cest opposer une démocratie dacteurs aux images habiles de la " corporate governance ". La participation effective des différents corps est essentielle parce que linstitution universitaire connaît des changements profonds qui affectent son identité : le processus de Bologne, lémergence des pôles dexcellence, linformatisation du savoir, la pédagogie des compétences
Lenseignement supérieur et luniversité se trouvent actuellement dans un contexte de marchandisation et de privatisation, qui existe en dehors de Bologne, mais dont Bologne pourrait être un catalyseur. Trois défis : le premier est de lutter contre linstrumentalisation croissante de la formation, le second consiste à assurer un financement public, portant à la fois sur lentièreté de la formation et sur les équipements de formation. Ce financement doit être la priorité budgétaire, cest un choix politique à opérer par nos représentants ici présents. Le troisième défi est de définir un cadre normatif global à léchelle internationale, et il sera certainement aussi difficile à relever que le précédant. Enfin, les objectifs de connaissance, de communication, de culture et de citoyenneté, pour reprendre les 4 C chers au recteur, et nous insistons particulièrement sur les 2 derniers, doivent être ou devenir ceux assignés à toute formation. La réalité avance à mots couverts car, derrière le " quasi marché", cest limage factice de lenseignement qui se profile et correspond aux exigences dun marché réel. Monsieur Jean-Jacques Viseur, Président du Conseil dAdministration, nous dira-t-il tout à l'heure que le processus de Bologne doit dabord et avant tout être ouvert à un débat démocratique et critique? En soumettant la gestion de ce dossier à des impératifs de politique de survie, luniversité risque de se couper du projet humaniste quelle prétendait justement sauvegarder. Nous ne devons pas considérer ce contexte comme inéluctable : chacun dentre nous peut clairement jouer un rôle afin que luniversité humaniste soit et reste dactualité. Cette année, où nous fêtons les 30 ans de Louvain-la-Neuve et de Louvain-en-Woluwe, nous rappelle lengagement du monde étudiant qui seffectue, en premier lieu, sur leur cadre de vie même. Louvain, ville dans la ville, microcosme ou village de Schtroumpfs, peu importe au fond, lessentiel est que les étudiants aient su prendre place en tant quacteurs sur les sites ; engagement pour la vie du site, engagement pour la conception du site, codécision quant aux lignes directrices du projet. Cest cet esprit initial de conception despaces de liberté que nous voulons retrouver, à lopposé de lactuelle logique de promotion immobilière avec laccord bienveillant des communes concernées - . Parce que, dune part, on séloigne du projet initial avec pour conséquence lapparition de problèmes qui sont inhérents au manque de participation de ses acteurs. Et, dautre part, on parle de développement de la citoyenneté et non pas de privation de cette participation à la vita civitates . On ne peut promouvoir une vision au sein des cours, au sein de la commune ou pour l'enseignement et puis émettre pour une application possible, parce que les étudiants ne seraient que de passage, une exception d'irrecevabilité. Cest pourquoi, cet automne, sur ce chantier en évolution et en ébullition, les étudiants organisent un Congrès : le Congrès des Etudiants, qui aura pour objectifs une réflexion et un engagement actif dans ces domaines de cadre de vie, de vie étudiante, de lien cours/extra-académique et de participation. Pour conclure, si les résolutions de début dannée devaient réellement apporter du sens, si nous voulions faire de limage que nous reflétons aujourdhui la réalité, alors il nous faudrait poser des actes. Ces actes, nous les croyons non seulement possibles mais nécessaires. Cest donc affaire de choix politique, de bonnes décisions à bien prendre. (Texte rédigé par Rodolphe Sagehomme et John Pitseys. La version prononcée s'écartait parfois significativement de la version écrite.) |